Voyage en Argentine. Retour sur Buenos Aires, let’s tango !

IMG_5611Looping cinglant

Le retour à la ville procède d’un looping cinglant. On comprend alors la nécessité d’hôtels aux amortisseurs confortables. On pense bien évidemment à El Algodon , autre Relais & châteaux, taillé comme une demeure et disposant sur son toit d’une piscine cosy. Il y a aussi de superbes machines comme le Park Hyatt situé dans un palais majestueux (le palacio Duhau) ) et dédoublé en deuxième rideau -insolemment arboré- d’un immeuble au luxe efficace. 

On peut alors reprendre le pas de deux avec Buenos Aires. Et pour cela, il existe un vocable: tango. Il conviendra en l’espèce de ne pas tomber dans les pièges touristiques désossant le genre et vous clonant dans une marée neurasthénique. Mais de taper au vif. Au plus pur avec des adresses comme  le salon Canning, temple renversant où se frôlent, s’émerveillent des couples vintage. Ces instants sont de pure grâce, avec des gestes d’insectes en chant d’amour, accordant leurs élytres électriques, subjuguées. Des silhouettes merveilleuses d’hommes câlinent leur partenaire comme un horloger sondant le mécanisme d’une horloge. C’est toute une poétique érotique où les chevilles, les pieds, les bassins et les mains, les bouches, développent un langage démultiplié. C’est parfois grandiose dans des séries de pas suspendus, définitivement émouvant lorsqu’un geste reste en suspens. On se demande alors si l’histoire ne va pas s’arrêter, que l’hypothèse hésite devant l’infini. On en ressort le coeur chaviré. Pour mieux recommencer, cette romance charnelle partant comme un frêle esquif.

Ensuite, tout fonctionne comme des essuie glaces. Non aux marchands de rue de San Telmo, lassants de répétitivité. Non  au café Tortoni assommé de pantacourts et de déprime vacancière: ce lieu historique étouffe sous les embrassades, s’enkystent dans les lumières sépias. Un jour, on le relèvera sans vie, son âme se sera envolée dans un selfie de trop. Non au jardin japonais, lorsqu’il fait trop beau. Il est alors gorgé de visiteurs. Mieux vaut aller juste à côté à la Rosedas, superbement planté de rosiers. Oui au restaurant Sucre, conçu par un as, Fernando Trocca et délivrant un sublime tiramisu.IMG_5604

Ce soir, au restaurant Tegui, une des meilleures tables de la ville (et d’Amérique latine), le spectacle est dans la salle. Et dans l’assiette. Le public est aux taquets. Il est  toujours aussi cocasse de voir des colosses débonnaires se pencher au dessus des assiettes contenant des rondelles de radis. Car ici aussi on fonctionne au tasting menu, la plaie du siècle. A la question rituelle des allergies, j’ai répondu avec gravité, le tasting menu. Le serveur n’a pas perdu sa contenance et a déclenché un repas en trois sets extraits de la procession papale. Pas mauvais au demeurant, même parfois avisé comme ces tomates aux fruits rouges, et une mixture très cosmétique. D’ici peu, prenons les paris, on devrait pas tarder à avoir des plats qu’on pourra s’appliquer sur le visage à la pulpe de mangue et au pépin de Corinthe.