Vive l’assiette !

Vive l'assiette copie

Petite humeur passagère…

Un jour, on devrait récompenser les serveurs. Non seulement parce qu’ils doivent subir les caprices et les humeurs de la clientèle, mais aussi, depuis peu, ils ont la tâche ingrate d’apporter de nouveaux récipients tombées du nouvel esthétisme. S’il en est parfois qui sont de véritables trouvailles, ingénieuses et plaisantes (au restaurant Sola, à Paris avec des créations joliment délurées), la plupart du temps, ces inventions restent au stade de l’intention. Les couverts tombent soudainement, les verres partent à l’oblique. Mais le plus délicat reste tout de même ces fameuses ardoises, fines comme une lame, que l’on vient déposer sur la table. L’atterrissage tient de l’aéroport de Hong Kong au siècle dernier, où le serveur doit effectuer un virage redoutable.

Le plus dur doit être l’instant du départ. Je me suis toujours demandé comment pouvait-on saisir l’insaisissable. Le contact n’est pas des plus évidents et la surprise, si elle dure un instant, n’est pas forcément positive. Qu’à la limite, à Angers, on joue sur cet élément local, comme à l’Auberge de la Roche, à Saint Jean de Linières, soit, mais dans d’autres tables cela reste un ajout superficiel. Idem pour des plats servis dans des casseroles, voire des cocottes. Il y a une dimension hautement sympathique à procéder de la sorte, mais l’exercice est redoutable : on est obligé de plonger dedans avec les couverts à la verticale et savourer un plat dans ces conditions devient aléatoire. Il y a là un certain lumpen chic à procéder de la sorte.

Cela dit, le public n’est pas aussi passif que cela. J’avais été ainsi le témoin d’une scène délicieuse dans une hostellerie hautement cotée, près de Dijon, où pour le déjeuner, le chef avait décidé de servir ses plats "paysans" dans des cocottes de fonte. Un couple fort simple était attablé et visiblement restait impressionné par la notoriété du lieu. Le mari, grand classique, ne mouftait pas, mais on pouvait sentir la dame hautement contrariée devant ce raccourci de la table. Elle cherchait une assiette qui bien évidemment n’existait pas. Le mari suppliait de  ne pas faire d’esclandre, mais la lumière de ses jours ne se laissa pas conter. Elle réclama le maître d’hôtel, réclama une assiette. Lorsque celui-ci revint avec ce disque, aussi magnifique qu’une auréole ; la dame  attendit un instant avant de dire à son mari : "Non mais !"

 

  • Claire
    31 mars 2011 at 11 h 11 min

    J’adore ! L’anecdote est adorable !