Senderens, l’irruption du Gastrovac ou l’évolution par le vide

 
Voici un engin qui est ent rain de pointer son museau dans toutes les cuisines. Aussi laid que séduisant, il fonctionne ainsi : en créant une basse pression artificielle, d'atmosphère en l'absence d'oxygène, le Gastrovac réduit considérablement l'oxydation , permet de faire bouillir à 50°C , de frire à 90°C , limitant ainsi la décoloration des aliments et une conservation des saveurs originales. Il fait un « effet d'éponge » : quand la pression atmosphérique est reconstituée, la nourriture absorbe le liquide autour d' elle, permettant des combinaisons infinies d'aliments de saveurs crus ou cuits. Prix public, environ 5000€.

SENDERENS 

C'est Alain Senderens qui m'en a parlé il y a peu, j'en ai fait un papier pour le Figaro, je vous livre ici une version intermédiaire…

Il faut le voir  avec sa barbichette de professeur Cosinus, sa fièvre émouvante, son trouble itinérant. Il y a chez Alain Senderens, 71 ans, comme une impatience constante, une frayeur évidente : celle de ne plus être dans le coup. Il est là, fébrile, cherchant ses mots. Tel Hamlet sur son crâne, il est là au-dessus de son assiette se prenant la tête entre les mains : , "Mais quelle est la vérité de la sauce ?!".

Dans son ample restaurant de la place Madeleine sans doute, sent-il l’haleine de ses jeunes seconds sur sa nuque. Pourtant, il a toujours bien su s’entourer : Bertrand Guéneron, à présent dans son Bascou providentiel (31, rue Réaumur, 75003 Paris ; 01.42.72.69.25) et maintenant Jérôme Branctel, lui aussi une fine lame au regard intense, un déjà bon, un futur grand. Que pense t il vraiment de son mentor, de son aîné ? Il faut sans doute le demander à ses plats : mobiles, vifs, tranchants. Cela fait de cette table (ouverte 7j sur 7 !) une gentille providence le dimanche soir. D’ailleurs,   regardez bien : il y a un paquet de chefs qui viennent "voir", comme on dit.

Facile à reconnaître, comme tous les gens vivant constamment en uniformes (CRS, pompiers, prêtres), ils ont un mal de chien à s’habiller. Ils vont sans doute rappliquer en masse après ce papier parce qu’Alain Senderens (il n'est pas le seul: Pascal Barbot, Jean Chauvel s'y sont mis avant…) va encore mettre le bazar avec ses nouvelles créations. Déjà qu’il avait mis un souk pas possible avec son vrai-faux retrait dans la course aux étoiles (il en a toujours deux) et en annonçant des prix baissés (vaguement), maintenant, le voici avec une <invention> du tonnerre, de la vraie poudre à canon.

Son truc ? une machine à faire le vide en quelque sorte. Il place dedans le produit brut (cru), il glisse sa sauce (une préparation froide) puis il appuie sur un bouton. Zou de hop, voilà la sauce se réfugier dans la chair du produit (une cannette, un saumon). Il ne reste plus qu’à chauffer la viande, la cuire lentement  sur une vaste plaque à induction: démarrage à froid, 25 minutes pour une portion de 200 grammes (avant, elle était saisie en 5minutes). Il termine à 280°c et pof, c’est terminé. Pas de sauce, même plus de casseroles (imaginez la tête des plongeurs), encore moins de marmites (un choc), c’est terminé.

Dans l’assiette, le foie gras "pur" (35€) est renversant de densité,  le dos de saumon snacké  (27€) est admirablement dépouillé et profondément moelleux, comme un effeuillé ; le filet de canette figues fraîches et raisins blonds (41€) est  annoncé<nu>. C’est une drôle de cuisine totalement interne, intérieure. La bouche devient comme un tabernacle, elle se met à penser. On fermerait les yeux pour les rouvrir sur ce drôle de bonhomme. Lui même était un chef saucier, le voilà en train de se tirer une balle dans le pied devant vous. Et c’est délicieux. Bien sûr, il ne touchera pas au lièvre à la royale, ou au bœuf bourguignon. Mais c’est un joli trouble qu’il vient déposer dans l’assiette.

SENDERENS2 

Le dîneur est à nouveau objetisé, il est là en réceptacle. La cuisine est en train de bouger, et là c’est saisissant. Senderens qui ne s’est jamais remis de son voyage en Asie, il y a 33ans (souvenez vous, ce fut un vrai séisme chez les chefs) est en train de nous faire le voyage immobile. C’est plutôt impressionnant.

Senderens : 9 place de la Madeleine, 75008 Paris (01.42.65.22.90).  PLUS D'INFOS MAP

 

  • Alain de Rungis
    2 novembre 2010 at 11 h 29 min

    Pour l’avoir testé , je confirme appareil absolument génial , grosse cocotte minute qui fait des miracles , malheureusement prix pas trop abordable pour le moment pour le grand public ….

  • Le Cookie Masqué
    2 novembre 2010 at 17 h 47 min

    mon rêve. Le père noël fait le sourd à ce sujet.

  • Isaac
    3 novembre 2010 at 20 h 01 min

    ??
    Le sens de l’article ??

  • Patrick
    3 novembre 2010 at 23 h 45 min

    ‘ une machine à faire le vide en quelque sorte.  »
    Si on pouvait l installer dans les cuisines de l Elysee…..

  • Alain de Rungis
    4 novembre 2010 at 19 h 06 min

    Patrick, pas très gentil votre remarque , Bernard Vaussion est un excellent chef qui a formé pas mal de jeunes dont Samuel Cavagnis du Versance ,entre autre

  • emmanuelle
    5 novembre 2010 at 9 h 43 min

    Vraiment hilarant. Faut lire à haute voix ca double l’effet. ca faisait longtemps que j’avais pas ri autant en vous lisant. Bravo.

  • porompompero
    7 novembre 2010 at 5 h 28 min

    desolée, mais ça vien de lespagne, on parle de la gastrovac, no?cest pas un nouveau truc, uixxxx…

  • Antonio
    7 novembre 2010 at 10 h 41 min

    C’est une invention de l’espagnol Javier Torres et Sergio Torres avec l’Université de Valence, et pour plus de 4 ans qui a été inventé. Il n’ya pas de nouveauté dans leur utilisation. En Espagne, il est utilisé dans toutes les grandes maisons. Je pense que vous devriez expliquer l’origine de la création, à souligner le travail des artistes et de favoriser de nouvelles créations. Antonio

  • JP
    15 février 2011 at 11 h 05 min

    C’est un appareil génial, mais il n’existe aucun livre de recettes permettant son utilisation courante par un néophyte. A quand ce livre ?