Pré Catelan, l’artifice Anton

Paris, Pré C, salle0016248
Cela faisait longtemps que je n’étais pas allé dans un grand restaurant…Pour tout vous dire, l’exercice me tétanise tant ces adresses jettent le lourd manteau de l’excellence. Cela m’effraie. Cela dit, le voyage est toujours aussi passionnant. Allez passons le costume, et réservons un taci..Direction le Bois de Boulogne et ce, pour la bonne cause….

Frédéric Anton, immortalisé par la ­téléréalité (MasterChef sur TF1), entre de facto dans un nouveau monde. Le voilà archicélèbre, boosté, accéléré au micro-ondes. On le connaissait sérieux et rentré, le voici brûlant et affiché. La télévision l’a réincarné, le déposant ailleurs: sur le canapé de votre salon. Ça fait tout de même un drôle de choc, cette transplantation, ce téléchargement. On doit avoir les codes inversés, les cordons de branchement entortillés, les fils qui touchent. On doit vous saluer dans la rue, et qui sait, vous tutoyer alors qu’on n’a rien fait, juste houspillé des hésitants, admonesté des ­patauds, encouragé des tiges vertes. Quel destin!

Paris, Pré C, stp
Du coup, on ose à peine aller dans son restaurant, Le Pré Catelan, situé dans un bois de Boulogne toujours aussi bien planté. On a presque peur de ne pas bien se tenir à table, d’avoir la serviette de guingois, le pardessus de traviole. Même lorsque l’assiette arrive, on n’ose la regarder en face. Du reste, on aurait du mal, car le principe des plats, ici, est la démultiplication. Lorsqu’on vous sert une langoustine (ou une saint-jacques, de l’oursin, du saint-pierre), elle arrive en quatre livraisons: les yeux vont dans tous les sens. Les assiettes attendent en file indienne, un peu comme au péage de Rocquencourt. On réalise alors que la langoustine peut avoir une vie plurielle, passer de beignet à raviole, et ainsi de suite. Une sorte de catalogue de couleurs, très ouvert.

Paris, Pré C, mosaique
L’enchantement se fait ici de façon séquencée, comme dans une émission de télévision rythmée par des écrans de publicité. Il y a beaucoup de vivacité dans la cuisine de Frédéric Anton, c’est celle de son service qui fait un énorme travail de rangement et, à mi-temps, de déménagement. Le propos de l’assiette, lui, est dilué. À l’instar d’un dessert à la pomme très pic d’audience, taquinant l’audimat: il s’agit d’une pomme logée dans une sphère sucrée et désarmante de redondance s’il n’y avait ces petites substances qui vous pétillent dans la bouche (remember: Jean Chauvel, au Magnolia, il y a une vingtaine d’années). En fait, la soirée se déroule bien, indolemment, sans percussion forte. La cuisine est passée au stade de l’image. L’expression prime, le sens expire.

Pré Catelan, Bois de Boulogne, 75016 Paris. tel.: 01 44 14 41 14. Comptez 200 euros par personne sans les vins…

  • Catherine Thenes
    12 février 2013 at 11 h 29 min

    Il n’y a pas de péage à Rocquencourt… A quoi sert cette assertion (fausse) dans votre propos, à part en relativiser la véracité et la portée ? Vous jetez vous-même le discrédit sur tout ce que vous énoncez après cela. Drôle de façon pour énoncer des vérités de commencer par une contre-vérité…

  • Jean-Louis
    12 février 2013 at 12 h 01 min

    Bonjour,
    Je ne sais, s’il y a un péage à Rocquencourt, et peu importe, mais j’ai aussi constaté que le Pré était plus porter sur l’image que sur le goût et le relief. Mais ce ne sera que passager, quand les lients se seront lassés, je sais que ce chef talentueux est capable de grandes choses.

  • j-o bigot
    12 février 2013 at 18 h 23 min

    le sens expire, l’expression prime…mais conrad veidt danse!Hommage monsieur simon au rock rennais?

  • SERIEUX
    13 février 2013 at 11 h 03 min

    Rocquencourt… François Simon voulait dire Saint-Arnoult (bien que le véritable nom de la barrière soit Ponthévrard), embarras fameux des trajets franciliens.

  • Laurent Jouanne
    14 février 2013 at 1 h 50 min

    Jean Chauvel a repris les Magnolias en 1999…