Paris. Michelin en vue pour la Tour d’Argent ?

(réponse demain)


Lorsqu’on est englué dans les classements (une étoile seulement), alors que votre histoire rutile, il faut faire quelque chose. Envoyer de signaux forts. Les guides, notamment le Michelin qui s’apprête à sortir le 9 février, sont toujours sensibles à ce genre d’adhésion à leur course aux médailles. Voici donc pour ce faire, la Tour d’Argent, monument national.  Elle est dirigée à présent par André Terrail, 35 ans, depuis la disparition de son père, Claude Terrail en 2006, à l’âge de 88 ans. Il a décidé d’ alléger sa monture en vendant une partie de sa cave, en procédant à des travaux de rigueur, aux toilettage des détails (tenue des voituriers, nappage, verres, carte des vins…) et surtout en débauchant un chef solide:  Philippe Labbé, 54 ans (ex-Chèvre d’Or d’Eze Village, Shangri-La Paris, Anrsbourg à Baerenthal). Objectif deux étoiles. Logiquement devant tant de bonne volonté, le guide devrait céder, lui qui est si sensible aux efforts effectués paupières baissées. Mais ce serait oublier que la Tour d’Argent est un spectacle exceptionnel, sans doute le plus beau travelling donné dans le monde. Il débute à la sortie de l’ascenseur (6eme étage) lorsque la nuit bleutée dramatise un Paris subjuguant de beauté. Surtout, si vous y allez, ralentissez le chemin qui vous mène à votre table. Personne ne vous blâmera.  Le service s’immobilise sur votre passage et lentement se découpent dans les baies vitrées l’île Saint Louis, la Seine, Notre Dame. Cela dure une minute à peine et rien que pour cela la Tour d’Argent mérite trois étoiles. Ensuite, le travail d’une service omniprésent prend le relais avec enfin le retour de la découpe du caneton au guéridon, acte de noblesse des maîtres d’hôtel, fierté d’une profession. L’assiette s’est modernisée et personne ne semble s’en plaindre. Elle est même bonne, alors que pendant ses années de traversée de désert, elle était engoncée, datée, sans énergie. Voici donc les châtaignes (crues et croustillantes) de Saint-Marcel-les-Valence auréolées de truffe blanche d’Alba, relayées par des tortellinis ou encore, sérieux, les oursins de Dinard « péchés à la main » et son petit duvet de caviar. Le caneton est bien présent avec son « camouflage » d’automne, crackers de canard, sanguette épicée, betterave de couleur. Il fait le job, bat du tambour et reprend le flambeau. Certes, il y a les « mignardises » de rigueur (mais pas indispensables) dans les amuses-bouches et pré-dessert, baissant le niveau et égarant le palais, mais à la Tour d’Argent, ce que l’on attend, c’est un moment inoubliable, une soirée du tonnerre. Et cela, on est amplement servi, l’addition apportant un ultime et dernier coup de canon, indispensable à ce genre de secousse.

Les meilleures tables. Bien évidemment, le long des baies vitrées. Il n’y a pas de truc pour en décrocher une, si ce n’est de trouver les bons arguments lors de la réservation.

Dommage. Les prix tout de même.

A emporter. Il y a pour cela les produits de la maison, la boulangerie récemment ouverte en face avec des pains de remarquable facture. Mais ce qu’il faut soigner, c’est le souvenir que l’on emportera. Pour cela, jouez le jeu!

La Tour d’Argent, 15-17, quai de la Tournelle, 75005 Paris. Tel.: 01-43-54-23-31. Fermé dimanche et lundi.

Mercure: 21°c, maitrise impériale.

Décibels. 81 db, babil apaisé d’une assistance en lévitation.

L’addition. C’est là où ça cloche, comptez sans compter au moins 300 euros par personne, vins compris.

Minimum syndical. Le menu du déjeuner à 105 euros.

Verdict: au moins une fois dans sa vie.

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