Paris. Le Lucas Carton, l’art de rebondir

ingratitude du passé



Le Lucas Carton vibre encore

Dieu que parfois le passé est lourd. il est encombrant, prend ses aises, respire bruyamment. C’est terrible,mais c’est comme ça. Prenez le restaurant Lucas Carton, fulgurant trois étoiles jailli en 1939, jouant à l’internationale depuis 1945 et transcendé dès 1985 par une pointure pensante, Alain Senderens. Lorsqu’en 2005, ce dernier rend ses étoiles pour en faire une brasserie de luxe (vocable qu’il le répugnait), le bateau commença a prend du gite, malgré le brio d’un second, Jérome Banctel. Il faillit même faire naufrage, disparu des radars et depuis 2014, tente de remonter le courant avec un jeune chef, Julien Dumas, formé par l’immense Jacques Maximin. Vous parlez d’un cadeau empoisonné. Comment faire bouger cette institution sans se pincer les doigts? Julien en plus est encore dans sa fougue, ses hésitations. Il sait qu’il doit composer, lever le pied mais aussi accélérer. Faire de l’innovation mais sans turbulences, respecter le passé tout en le réanimant. Voila pourquoi sa cuisine est louable, même  courageuse, voire carrément gonflée dans des compositions comme ce chou fleur croustillant à redonner espoir aux paysans bretons (facturé  39 euros). Un tour de passe passe assez bluffant, réussissant à réincarner ce légume poussif en créature jonglant entre les acides et le gratiné, l’humilité d’un produit et la touche d’un chef. On pourrait faire la même lecture du merlan (cuisson limpide) enrobé dans une crêpe de sarrasin et délivrant un climat soutenu grace aux pointes gingembre, agrume, ail et piment. On se dit alors que le Lucas Carton vibre encore. Certes le décor se remet lentement des laborieuses tentatives néo-néons contemporaines, alors que les boiseries marjolains. Il faudrait aussi que la clientèle joue aussi le jeu, se mette le coeur en habit, fasse quelques efforts, car le midi, les hommes d’affaires en décontracté délivre un message guère sexy. Le service dirigé par Loic Morvan, heureusement est là, tel des moussaillons tirant sur les bonnes drisses, ménageant les distances et la proximité. Le Lucas pourrait repartir pour de somptueux voyages. Si tout le monde s’y met.

Meilleures tables. Dans l’entrée à droite, donnant sur l’église de la Madeleine, sans doute l’une des plus belles tables de Paris. sinon, ici et là.

Dommage. Les hommes d’affaire en roue libre.

A emporter. Offrir un cadeau pour deux couverts. A partir de 132 euros.

Lucas Carton, 9, place de la Madeleine, 75008 Paris. Tel.: 01-42-65-22-90.www.lucascarton.com Fermé dimanche et lundi.

Décibels: 77db, le doux bruissement des conversations.

Mercure: 20°c, maitrise climatisée;

L’addition. Attention, c’est un restaurant de luxe avec décor historique, donc addition conséquente: 150 euros par personne sans les vins. Menu dégustation 170 euros.

Minimum syndical: le menu du marché à 66 euros.

Verdict: c’est tout de même tentant, non ?!