C’est toujours tentant de rebattre les cartes. Si excitant. Déplacer ses atouts histoire de déstabiliser, se réinventer et faire un carton. Prenez le tout nouveau Crillon. Il se languissait jusqu’alors avec son restaurant gastronomique dans la merveilleuse salle des Ambassadeurs avec comme vassaux, un deuxième restaurant paisible, un bar planqué et guère de terrasse. Après deux ans de travaux titanesques, revoici ce palace en train de grimper à ses propres rideaux. Tout a été redistribué. Tout le monde parle du restaurant gastronomique, l’Ecrin, mais qui ira à cette table? Elle ne joue que le soir et ne laisse au visiteur que deux options obligatoires, un menu signature à 260 euros(douze séquences) et un autre au titre cocasse « Liberté » à 195 euros (sept « temps »). Pas de carte donc, juste la génuflexion obligatoire devant cette tannée que constitue le « menu dégustation ». Dans ces cas là, la meilleure solution consiste à se rabattre sur la table en deuxième rideau, en l’espèce la brasserie d’Aumont, aménagée dans un ancien petit salon et doté d’une terrasse (belle idée!). Dans ce genre de configuration, il y a toujours un second qui rêve de briller, de dévorer le capitaine, et délivrer à prix serrés des plats compréhensifs. Accueil en surmultiplié, avec maitres d’hôtels dans tous les coins. Le pain est servi avec un générique nouveau: le nom du boulanger qui travaille sous la houlette du chef pâtissier, vient ensuite les variantes (céréales, etc). Soit pour un morceau de baguette. Un vin est manquant, pas grave, accueillons la salade de homard (38 €). Elle la joue à la verticale sans grande conviction, en format court, et avec une petite feuille de salade un brin fatiguée. Le tartare de boeuf fumé n’est guère sexy dans son apparence maussade, et sans grand intérêt majeur à l’instar d’un saumon à l’oseille (34€) très room service, seules les pattes de grenouilles un peu grassouillettes (mais ça va) tirent une petite épingle du jeu d’un diner conclu par un vacherin révisité avec les pieds; mental et sphérique, sans gourmandise. Finalement, histoire de conclure sur une bonne impression, on file dans le bar installé dans la salle des Ambassadeurs. c’est extra, service hyper gentil, excellent pianiste, cocktails du tonnerre. Le Crillon vient de rebattre ses cartes: cassos sur les restaurants, bingo sur le bar!
Les meilleures tables: en terrasse aux beaux jours, au comptoir ou alors près des fenêtres.
Dommage: la cuisine veut briller, elle reste terne.
A emporter: ses cliques et ses claques pour rejoindre le bar.
Brasserie d’Aumont, le Crillon, 10, place de la Concorde, 75008 Paris. Tèl.: 01-44-71-15-15; redwoodhotels.com
Décibels: 72db paisible bruissement mondain.
Mercure. Climatisation aux petits oignons.
L’addition: pfou, on s’embarque vite dans les 80€.
Minimum syndical. un cocktail au bar (21€), c’est extra.