Paris. Anahi, le come back de l’été

comme avant

Chaque jour un restaurant ouvre à Paris. Un autre ferme. Les bourrasques tombent sur n’importe qui. Puis s’en repartent. Anahi, rue du Vertbois, aurait du disparaitre du paysage. Tour à tour charcuterie, jeannerie, ce restaurant hébergé dans un HLM de la Ville de Paris a bien failli calencher lorsque la Jeune Rue (2014) s’empara d’une trentaine de commerces dans le quartier dont celui-ci. Ce fut hélas une soudaine et vive catastrophe s’emplafonnant dans l’opprobre et la débâcle. Personne n’aurait versé une larme, ni même un centime sur cette adresse jadis à la mode, alors à la morgue. Après tout, son passé était magnifique. Elle pouvait passer à l’éternité. Pendant vingt neuf ans, deux soeurs (Carmina et Pilar) firent vibrer la nuit parisienne, affoler les « bandes », Chereau, Jean Genet, la mode, la mode, la mode. Leur recette? Le sens de la fête simple, les musiques sud américaine, cubaine des années 30-60. On y dansait même le flamenco faisant ressortir les convives fortunés et envieux du restaurant mitoyen, le mythique Ami Louis.  On y servait du guacamole, des viandes argentines et des nuits sans fin. L’adresse allait disparaitre. Elle fut rattrapée par les cheveux par un entrepreneur monégasque, Ricardo Giraudi, anglo-italien, ex-concertiste, importateur de viandes rares (Kobé, Kagoshima, wagyu). Avec la complicité du cabinet d’architecture Humbert & Poyet, il a remis d’équerre la maison, nettoyé les marbres, gratté l’or envahissant, recoulé un sol en terrazzo, une sorte de mélange de pierres colorées et de marbre lissé comme un ciment. Il a redonné aux globes lumineux leur pénombre magique (ampoules de 25 watts). Anahi renaissait et par là même suscita à la surprise générale, le retour de l’âme des lieux: Carmina. Revenant de Séville, elle fit se lever d’un bond son public enamouré  lors d’une standing ovation mi- mai. Et l’assiette ? A la limite, le casting suffirait (il y a là également  Camille, maitre D de la Belle Époque), la clientèle aussi; la semi obscurité forcerait l’indulgence. Il se trouve que la viande est superbe dans l’assiette et ce sous un jour que les Parisiens ne pratiquent peu, tant le thème semble immobilisé façon saucière, frites et poivres moulus. Non, ici, le morceau est dangereusement seul dans l’assiette. Presque statufié au risque de tout prendre sur le cornet. Mais cuisson parfaite, viande croutée, saveurs poussées. On réalise que la viande peut être belle et bonne réinventée a minima comme un diamant, brute et solitaire. Petites purées pour les calmer les traditionalistes et carte abattant plus qu’honnêtement l’historique: guacamole, ceviche…Il y a aussi un autre élément unique chez Anahi, c’est cette bande son mélangeant excitation, conversations  de voix. De voix qui vivent.

Meilleures tables. Dans l’entrée à gauche. Nouveau, la deuxième salle fait maintenant office de bar.

Dommage. La carte des vins quelque peu rustaude, les desserts balourds.

A emporter. Bientôt les couteaux Saladoni dessinés par Ricardo Giraudi seront en vente.

Anahi,49, rue Volta, 75003 Paris. Tel.: 01.48 87 88 24. Ouvert tous les jours. Dernières commandes à minuit.

Décibels: 90db, ambiance délurée et suractive.

Mercure: moyenne saisonnière: 20°c

L’addition. On peut vite aller dans les 80€, mais logiquement on peut facilement limiter les dégâts.

Minimum syndical. Steak direct 25€.

Verdict: pas donné, mais jouissif.