Neva Cuisine, une sagaie en hiver

Paris, Neva, salle
Parfois, un restaurant se bat tout seul, même contre lui-même. Il faut alors que les nourritures soient bigrement fortes pour passer. La réservation fut âpre, ici. Il fallait venir tôt, tard. C’était souvent complet. Ensuite, ce furent les amis qui jouèrent les absents… de retour. Et nous voilà, enfin, revenus dans ce restaurant qui nous enchanta à ses tout débuts, il y a bientôt deux ans. Et patatras, malgré le service souriant et compréhensible, nous avions la pire des tables en ces jours d’hiver transis, si bien que, à chaque fois que les clients entraient, le vaste rideau de velours gonflait comme une voile, faisait sa corolle et lentement, si lentement, se rabaissait. Ce qui signifiait que la porte s’était enfin refermée. Entre-temps, un joli froid mordant vous montait dans les jambes comme si une eau froide s’en était venue. Au début, on n’y croit pas. La meilleure des choses, c’est de ne pas grogner ni faire le ronchon, mais ouvrir une bonne bouteille de croze-hermitage, ce que nous fîmes. Et basta le froid, après tout se plaint-on qu’il fasse chaud en été ? Petit problème numéro deux. On n’y voyait goutte. Jolie pénombre, certes, glamour probable, mais à part l’assiette de mon vis-à-vis percée de lumière, les deux autres couverts végétaient dans une ambiance de sacristie. Du coup, croyez-moi, les plats avaient intérêt à relever bigrement les manches… Sinon, on y allait à la pelle à charbon !
Paris, Neva, meringue
 Effectivement, les plats arrivèrent comme des sagaies venues de nulle part. Une puissante gourmandise, affûtée à souhait, ferraillant sec, transformant des sot-l’y-laisse en un ravissement, et une queue de boeuf mémorable, assaisonnée divinement, à tomber sur le derrière. L’assaut fut bref, parfaitement centré et lorsque les desserts sont arrivés (dont une meringue crémeuse), la partie était brillamment gagnée. Nous étions séchés de béatitude, sur le bord de la route, bernés et sifflotant dans la nuit fraîche. Un des meilleurs repas de ces dernières semaines !
. Ce qu’il y a d’agréable ici, c’est que les clients sont venus pour bien manger. Et cela se voit tout de suite. Non seulement, il y a l’unisson de la satisfaction, mais une sorte de bien-être communicatif.
Prix: La formule à 39 eur le soir tient plus que ses promesses. Au déjeuner, formule à 24,50 eur.

NEVA CUISINE 2, rue de Berne, VIIIe. Tel. : 01 45 22 18 91. Fermé sam. midi et dim.