Milk It, l’innocence lactée

Paris, Milk it

Il y a peu, le Figaroscope s'est attaché à visiter les bars spécialisées (façon de parler). J'ai hérité pour ma part d'un bar à yaourt. Autant dire que je m'estime plus qu'heureux…

Parfois un restaurant doit faire peur avec sa diversité, son explosivité. Tant d’abondances, de plats, de saveurs, de déluges caloriques…Du coup, on semble trouver un refuge dans ces établissements qui ne chante que d’une seule note. Il y a juste là une voix a cappella qui vous murmure ce qui lui chante. Cela doit rassurer. Au moins, on se dit qu’il ne peut pas nous arriver grand chose car ces cafés n’ont pas la mitraille planquée derrière la caisse. C’est tout juste s’il y a des cuisines, un cuistot, des frigos. Non, ce ne sont que des adresses de la légèreté, à deux doigts de l’éphémère (la valeur rassurante de notre époque). Elles s’excuseraient presque. Ce n’en est pas loin comme à It Mylk, non loin du carrefour de l’Odéon, un samedi midi. Je pensais que l’établissement serait plein à craquer. Non, il était 12h45, beaucoup de touristes, de piétons, il n’y a pas plus passant que cette partie exposée au soleil, juxtaposant le Procope. Et pourtant, la boutique était fermée. J’ai attendu en regardant pendulairement des personnes tenter de rentrer, poussant de façon perplexe la porte, puis reprendre leur chemin. Il fallait juste attendre 13 heures, Paris décèle quelques intrigues de la sorte…

Les milk shakes. Rien de plus angélique que ces poissons arachnéennes. Si l’on comprend bien, puisque c’est affiché partout, il s’agit d’une boisson 0%. Vous avalez un nuage. Un petit nébulus rose dragée. Rien ne peut vous arriver. Personne n’y a touché, il est né dans une rose, une cigogne s’éloigne dans l’azur de la Rive gauche. Si franchement la promiscuité vous perturbe, il y a même un interférent : la paille. Cela devient étrange. Le liquide pas déplaisant (une composition de yaourt et de fraise) traverse le bocal buccal comme un VIP à la douane, pas même de guichet, de file d’attente, zou, directement à la trappe. La bouche se demande ce qu’il se passe. Rien, en fait. Juste un convoi aérien qui joue à saute-mouton et qui saute dans la glotte. C’est drôle : on a l’impression de ne pas manger (la bouche se croise les bras), on se sustente. Une sorte d’intraveineuse délicate, désincarnée. Bientôt, on mangera par pression digitale dans des cabines luxueuses posées, comme des confessionnaux, le long du boulevard saint Germain. Décor innocent où même les lettres se font petites, ne passent jamais en majuscules.

MAIS ENCORE…

Le service. Ultragentil.

La clientèle. Essentiellement féminine, ravie de ne pas être encombrée de mecs et déjeunant, vite fait bien fait.

Est ce bon ? C’est fort agréable.

Est ce cher ? 5,10€ pour une pause paisible et rafraîchissante, c’est moins cher qu’un cappuccino à Un dImanche à paris (6€) mais plus cher que la même composition sur la terrasse duTennessee (130, bd Saint Germain) : 4,20€.

Faut-il y aller ? Si vous passez dans le coin, parfait pour sauter un repas.

It Mylk, 15, rue de l’Ancienne Comédie, 75006 Paris (01.43.26.84.13). tous les jours de 13h à 19h. Autre adresse : 56-59, rue Caumartin, 75009 Paris.

 

  • so
    28 mars 2011 at 11 h 14 min

    J’aime tellement venir prendre l’air dans vos phrases, tellement l’habitude d’être soufflée, pliée, bouleversée que j’ai cru que « poissons » arachnéennes pouvait être une nouvelle image. Heu mais là c’est peut être juste un glissement de clavier quand même…