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Paris, Dauphin, Inaki back

Qu’y a t il de commun entre Rem Koolhaas, architecte d’envergure mondial, signant la semaine dernière à la Hune son dernier livre paru chez Taschen (Project Japan) et le Dauphin, avenue Parmentier. Tout. Si la gastronomie ne vous intéresse guère mais que vous tenez à prendre la température du genre, alors, il ne faut pas hésiter et réserver dans cet écrin de marbre blanc et de miroir. Il y a là comme un coup de poing, une sorte d’épée qui s’abat. C’est dit.

Paris, dauphin, ceviche
Une sorte d’éclair jaillissant, un credo, un manifesto. Que dit-il ? le glabre, le lumineux, l’art nouveau d’une vérité sortant de son puit. Elle semble être nue. L’endroit est extremement sonore, et on le sait, le bruit se nourrit de bruit. Une sorte de montée qui se masse elle-même. C’est envahissant, impérieux, il faut alors être soi-même sonore (la barbe !). Ce Dauphin, c’est avant tout la rencontre de Rem Koolhaas (et de son associé Clemént Blanchet) et de Fred Peneau, fils d’une lignée d’architectes nantais (dans sa famille, ses oncles et père étaient au nombre de…cinq !). Tous deux ont dialogué (ils continuent toujours sur d’autres projets) et ont claqué ce projet. Ensuite, le chef Inaki a mis les plats en musique, il a su trouver le swing de ce lieu glabre et tonitruant, sortir des plats râblés, brefs, eux aussi claqués comme une bise. Ou un beignet.

Paris, Dauphin, chou fleurR0014011
C’est très ludique, allusif. Parfois, on voudrait que le morceau dure plus longtemps. Mais l’air du temps se veut ainsi : concis, net, sans ambages. Allusif. Il y eut dans cette soirée multitude de petits éclairs. Ils n’étaient ni au chocolat, ni au café mais du style pluma ibérique, noix & salsifis (ceux-là à se taper la tête), saint jacques, panais & radicchios, ou encore ce virginal ceviche et eau de concombre. Il y eut de beaux instants cristallins comme ce filet de canette, navets & clémentines, se rapprochant des nouveaux classiques. Entre tapas et plats courts, une sorte de cri primal. Émis, les mains dans le dos, a capella. Parfois un serveur (le genre est barbe de trois jours, tablier blanc, regard sombre et jeunes filles dans les pommes), passait devant le variateur de lumière et nous redonnait une mine sortable, sinon on revenait à la douche blanche ; une sorte de carrière de craie, usinant à ciel ouvert, la ville et sa crudité (cruauté). Je ne sais pas si vous allez forcément aimer ce genre d’adresse juvénile et tonitruante, mais sachez que c’est ici que cela se passe. Vous savez maintenant où vous allez. Réserver est impératif.

Le Dauphin, 131, avenue Parmentier, 75011 Paris. Tel. : 01 55 28 78 88. Métro Goncourt. Comptez 35€.

Paris, Dauphin, 3
photos F. Simon.