Lancaster, le patio des hommes patients

R0010929

J'avais de la chance cet autre mercredi, le Figaroscope m'envoyait
ausculter le restaurant du Lancaster, et attablée, face à moi, Hélène
Gremillon me parlait de son premier roman à paraitre fin aout…

Pourquoi donne-t-on tant de crédit aux hôtels ? Parce qu’ils nous font
rêver. Ils contiennent ce que l’on n’ose pas toujours. Ils sont en
marge, guettant le moment où nous basculerons. C’est sans doute pour
cela que certains se l’interdisent. Peur d’y être vus. Que penserait-on
? Mais que du bien, voyons ! L’hôtel ressemble à ce que nous cachons
peut-être : une vie nomade, une vie rêvée, une vie de barreau de
chaise. Ils sont là dans la suspension. Et attendent. Le Lancaster
autant que les autres.

Peut être que celui ci a encore plus de vertu à
se tenir stoïque dans un quartier un peu veule, instable dans sa
destinée, coincé entre Champs Elysées et faubourg Saint Honoré, sulfuré
par la rue de Ponthieu. Il est un peu au dessus. Question de rang,
d’histoire. On y entrait en calèche. On pourrait encore le faire.
Marlene Dietrich y avait ses appartements, Greta Garbo aussi.
Aujourd’hui, il a comme une tradition de retenue. Au déjeuner, lorsque
le soleil vient tournoyer dans l’au-delà, le patio est sans doute des
plus exquis de Paris. l’assiette. Diable qu’elle est appliquée. Comme
si elle tenait de son rang (de perles). Elle tient cela de la signature
qui est venu superviser la carte. Michel Troigros.

Pas évident de faire
cela de loin, de son Roanne. On imagine un stand forain où l’on doit, à
l’aide d’une pince à sucre géante, décrocher un lot enfermé dans une
cage de verre. Ça doit être un peu pareil : la jalousie des confrères,
la tiédeur de la critique… Plus d’un s’est mangé les franges du tapis.
Lui est passé à travers, et a réussi son coup grâce à une cuisine
inspirée de l’Asie et d’une vision moderniste. Carte compliquée…mais
assiette bigrement carénée à l’instar de cette sole à la ciboulette (45
euros certes mais somptueuse) sortie de naguère mais passé à
l’accélération contemporaine. Saveurs pointues, exécution au cordeau.
Carte toujours aussi sophistiquée, jouant sur la sémantique, les
tonalités, les amers et les acides, les aigrelets. On a l’impression
que là haut, dans la cafetière, ça turbine.

MAIS ENCORE…
La clientèle. A l’heure du déjeuner, pratiquement que des hommes
d’affaires, style premier de la classe pouvant se coxer des additions
rivetées de carats. Conciliabules, airs entendus, carrières également
au cordeau. Bande son au chuintage millésimé.
Le service. Comme d’habitude, debout sur l’accélérateur, en totale
maitrise, buste droit et rictus international ; amabilité urbaine,
diction école de Lausanne.
Est ce cher ? Très cher à la carte mais menu à 52 euros valable
incluant un verre de vin.
Faut-il y aller ? Si vous en avez les moyens, assurément.

Le Lancaster, 7, rue de Berri, 75008 Paris (01.40.76.40.76). www.hotel-lancaster.fr

MAP

 
R0010930
 

  • Claude Polonsky
    24 juin 2010 at 15 h 31 min

    Lorsque j’ai vu sur votre blog la photo de la sole de la table du lancaster, j’ai immédiatement réservé, et j’ai emmené un ami y déjeuner aujourd’hui.
    Je ne vous parlerai pas de la « cueillette », très jolie assiette de légumes de saison, massacrée par la présence trop forte du vinaigre.
    Allons à l’essentiel, la sole : en fait nous avons eu une sole pour deux, c’est à dire la moitié de la sole de la photo vue sur votre blog, soit 2 filets par personne. Nous l’avons fait remarquer au directeur de salle, en lui montrant votre photo -ah ces Iphones!.
    Sans se démonter, il nous a été répondu que vous étiez venu il y a une dizaine de jours (vous ont ils reconnu?), et que la carte avait changé depuis aujourd’hui (carte d’été), donc demi-sole au prix fort puisque facturée au prix que vous aviez indiqué soit 90€ la sole entière. Sur la carte, il n’est pas indiqué filet de sole, mais sole. La limite de l’escroquerie. On nr nous y reprendra plus.

  • La Table du Lancaster-Michel Troisgros
    25 juin 2010 at 18 h 07 min

    Monsieur,
    Nous souhaitions vous remercier de l’intérêt que vous portez à notre Table du Lancaster.
    Suite à votre récente visite, vous nous avez fait part de votre mécontentement concernant « la sole à la ciboulette », dont François Simon fait l’éloge.
    Nous comprenons votre déception de n’avoir pas reçu ce plat à l’identique de la photo insérée sur le blog. La raison est simple. Entre temps, la carte a changé et nous avons revu sa présentation, mais sans modifier la sauce.
    Le poids de la sole est passé de 350 par personne à 650g pour deux personnes, elle est donc plus épaisse. Elle est présentée en filets, sans arêtes, afin d’améliorer sa dégustation.
    Nous sommes soucieux du bien-être de nos clients. Nous souhaitons qu’ils reçoivent un service et des mets d’une qualité remarquable et évoquer l’escroquerie est irrespectueux de notre travail.
    Nous pouvons vous assurer que quotidiennement, nous nous efforçons de transmettre une émotion à nos clients en élaborant une cuisine entre tradition et modernité.
    Enfin, pour vous être agréable, permettez nous de vous inviter à déjeuner ou à diner, à la date et avec la personne de votre choix.
    Dans l’attente du plaisir de vous recevoir, nous vous prions, Monsieur, de croire en l’assurance de nos salutations distinguées.
    Julien Roucheteau, Jean Paul Da Costa et Michel Troisgros
    HOTEL LANCASTER
    7 rue de Berri
    75008 Paris
    T +33 1 4076 4018 | F +33 1 4076 4035
    dir.restauration@hotel-lancaster.fr

  • A.O.
    26 juin 2010 at 11 h 45 min

    Un grand bravo à l’équipe du Lancaster ainsi qu’à M. Troisgros pour cette explication et ce beau geste.

  • Maillité
    28 juin 2010 at 15 h 59 min

    J’ai mangé le 25 juin à la Table du Lancaster et comme lors de mes trois derniers repas lors de ces deux dernières années, tout y était parfait! J’ai naturellement profité de la réclamation de Monsieur Polanski et eu une sole entière, la soeur de celle qui pose sur la photo. Les grands établissements tiennent compte de certaines remarques et j’aurais aimé que les rares où
    je me suis plaint se comporte comme les responsables du Lancaster. Contrairement à François Simon, je n’etais pas entouré d’hommes d’affaires mais d’une clientèle hétéroclite. Les prix sont certes élevés mais correspondent à une qualité irréprochable et à cuisine inspirée