J’en suis où avec les menus dégustation ? Toujours au même endroit !

DSC01242Avez vous une allergie ?

Oui, le menu dégustation

Cet été pour M, le supplément du Monde, j’ai eu le droit de me défouler sur quelques travers de la gastronomie. Croyez moi, ce fut très agréable…

C’était un charmant travers de la restauration, c’est devenu un fléau. Alors que le restaurant était un lieu que l’on choisissait pour sa liberté, son indulgence, le voici soudainement, inverser les rôles et nous imposer non seulement ses horaires (19h 30 ou 21h30?), ses prix (le menu à 55€ ou 95€) et surtout ses plats. Certes, il y a un minimum d’urbanité à vous demander si vous avez des allergies. C’est à ce moment précis que vous pourriez placer : « Oui, les menus dégustations ». Vous auriez un retour un sourire jaune et un grincement de dents (non facturé). Cette calamité ne remonte pas au Moyen Age, mais d’une pratique au Japon où l’on « s’en remet au chef » (omakase). Il décide alors d’épouser votre appétit selon que vous soyez mélancolique, enveloppé, amoureux. Car il est devant vous, derrière son comptoir. Il coulisse du regard et lorsque l’appétit fléchit, il peut envoyer le bol de riz final. En France, il en va autrement Le chef est en cuisine à l’autre bout du restaurant et il ne sait pas toujours à qui il a à faire : une mannequin déshydraté, un sumo sans visa, un stagiaire bucheron ?

En fait, le chef n’est presque plus dans sa cuisine. Il est dans son mental. C’est pour cela qu’il voyage beaucoup. Il pense et tombe nez à nez avec sa créativité. Il est traversé par sa vision du monde . Il nous livre  alors comme dans un cri primal, le verbatim de sa stupeur. C’est souvent des onomatopées (shebam, pow, blop, wizz…). « Ca fait vlam, ça fait splatch, et ça fait chtuck » (Serge Gainsbourg .1968). Parfois, c’est très bon, mais c’est comme un TGV passant à toutes blindes devant une gare de moindre importance. Le chef fuse dans son nombrilisme et vous, vous êtes comme la vache dans son pré. Infantilisé, objetisé. C’est pour cela qu’à peine le dessert envoyé, certains chefs foncent en salle se mirer dans nous, braves miroirs sagement assis, dodelinant de la tête de reconnaissance. Mais que l’on sache, la gastronomie fonctionne depuis la nuit des temps en mode alternatif, bientôt on viendra vous demander : « Qu’est ce qui vous ferait plaisir ? »

Et ça, ça sera drôlement bien !