Allez, allons à Saint Martin du Tertre

...pour un simple déjeuner

Le Martin Bel Air, ultime trait d’union

C’est tout de même bizarre de traverser les villages de France. Plus personne. Cette vie que l’on célébrait, la vie de village- n’existe plus. Tout est fermé, à vendre. Les centres commerciaux ont tout boulotté. Près de Sens, dans l’Yonne (2346 habitants), comme ailleurs, Saint Martin du Tertre semble déserté. Des maisons, des rues, des parkings; du vide, de l’absence. Pas un chat. Enfin presque. Dernier lien social, voici la table du Martin Bel Air, un restaurant repris en décembre dernier par Jean-Raphaël Persano, succédant à Chez Joëlle. Elle avait renoncé. La mairie a mis de sa poche (3000 euros). On a laissé voir si la mayonnaise allait prendre. Une chronique de Gauthier Pajona, sur France Bleu Auxerre, l’activisme des fournisseurs  dont Christophe Ducassou (Inter Vins, à Sens), le bouche à oreille, et quelques mois plus tard, la salle est pleine au déjeuner. C’est quasiment un miracle dont  se réjouit la clientèle. Certes la salle n’est pas folichonne dans sa modernité standard, son faux plafond de dalles , les fenêtres en PVC. Mais  visiblement, les clients sont venus ici pour autre chose, en découdre avec le menu servi en semaine à…18 euros. Pas de ces menus fantômes où l’on se faufile avec un aileron de poulet et une crème translucide. Non, un vrai repas. il débute avec une gougère tiède et dodue, avant d’attaquer  des poireaux cuits en court bouillon présentés à la verticale avec crème d’ail et oeuf onsen. C’est plaisant, délié, déluré, parfait pour attaquer la joue de boeuf confite au pinot noir, vrai plat de résistance avec ses pommes rates; plat de bonne humeur, décidé et vaillant. En dessert, brioche perdue avec ses pommes poêlées et sorbet maison de pomme verte. les tablées sont enjouées, fourchettent allègrement, commentent l’actualité du jour: un pan de la falaise de craie surplombant la route départementale 26 entre Sens et Saint-Martin-du-Tertre s’est effondré. La route est coupée, manquait plus que cela ! Et paradoxalement, Saint Martin du Tertre reprend des couleurs, se resserre autour de son restaurant.

Les meilleures tables. Près de la porte fenêtre à gauche en entrant, ou alors vers le fond de la salle, vers la lumière.

Dommage. On devrait être plus solidaire de ces chefs vaillants qui se battent pour des prix, un poireau à la verticale.
À emporter. Le restaurant fait dépôt de pain également. Il ouvre pour le petit déjeuner.

Le Martin Bel Air, Jean Raphaël Persano,  3, place du 19 mars 1962, 89100 Saint Martin du Tertre. Tèl.: 03-86-66-47-95. www.lemartinbelair.com

Décibels. Au fil du repas, les voiles gonflent: 89db.

Mercure: 21°c.

L’addition. À la carte, joliment dodue (foie gras, filet de boeuf, turbot), comptez 35-40 euros.

Minimum syndical: formules à partir de 15 euros et ce menu à 18 euros, en semaine au déjeuner.

Verdict: ah oui, valeureux et bon.