les épices, harmonium surexploité des cuisiniers

 

C’est bien connu : lorsque le poisson est limite, un peu fatigué et commence à se faire la malle, alors le chef utilise les grands moyens : le nappage aux épices. Et voilà le mourrant ressusciter, se lever de son brancard et parfois entamer une danse de saint gui. La dernière. Les épices ont de surcroît des noms enchanteurs. On les comprend à peine dans le bombardement des énoncés. Tout à coup, on passe d’un tropique à un autre, le plat fait les saute- méridiens et l’on se retrouve avec une composition balafrée des tampons douaniers. Souvent le produit disparaît. Il renonce. La coquille saint jacques reste muette car à côté les épices jouent des maracas : curcuma, coriandre, poivres de Séchuan, gingembre, wasabi… En cuisine, le chef s’enivre de potions magiques, appuie sur toutes les touches de l’harmonium en même temps. Cela fait un barouf d’enfer, les clients vont adorer ; les médias vont s’extasier. Copenhague, relae, olives, pdt

Pourtant, les épices devraient être les alliés des plats, leurs confidents. Elles devraient être un écho, un philtre, un messager. On devrait juste entendre leur chant lointain, leur passage tout au loin. Elles viennent de l’autre bout du monde, il s’agit juste de les poser au bon endroit, en quantité raisonnable. Le produit quant à lui, doit pouvoir compter dessus, y trouver une marche. Rien de plus savoureux qu’un plat qui fonctionne ainsi à l’unisson, le poisson ou la viande marche devant et sur les côtés, agiles et rieuses, les épices donnent l’ambiance, la coloration et parfois même l’élan…