À Paris, depuis quelques saisons, fleurit une nouvelle race de tables. Ce sont les acérés, les tranchants, les délibérés. Ils en veulent. Ils souhaitent percer, faire claquer un talent, une revendication, un style. Il s’agit alors de traverser la nasse, de transpercer les nuages, de faire vite: les crédits ne sont pas illimités, les banquiers attendent avec la clochette, la clientèle tournoie. Dans ces cas-là, il faut avoir un propos, voir clair et vite. Pas question de tergiverser, de faire de longs discours. Voilà pourquoi nous héritons de ces petits bolides délurés, sans complexe, doublant tout ce qu’ils veulent. Loin de la restauration commerciale et de ses marges, des concepts de filous, de restaurants sauteurs, il y a là comme des moines entrant en religion. Ils ont souvent le regard fiévreux, le poil ras, la barbe hésitante. Ils piaffent, ils vous attendent, ont mis toutes leurs économies dans la vaisselle et les fauteuils. La moindre des choses, c’est de le leur rendre visite, pas vrai?!

L’assiette.Elle aussi a de la nervure: Philippe Bélissent, qui décrocha une étoile à l’Hôtel. On retrouve sa cuisine très volontaire, harnachée au produit, ne déviant que pour la rime et les saveurs (coquille Saint-Jacques à la mangue verte, céleri, mouron des oiseaux et une petite touche de coing). Le pigeonneau est superbe dans sa cuisson et invraisemblable dans sa sauce: on dirait du sang, avec le plaisir cannibale de le saucer avec du bon pain. Desserts vifs aussi; un paris-brest ramassé mais sincère.
MAIS ENCORE
La clientèle. Fort bourgeoise avec les enquiquineurs traditionnels pinaillant sur le vin, bref les pervers narcissiques de la bouffe venus épater leurs commensaux et faire suer le personnel.
Est-ce bon? Oui, très.
Est-ce cher? Le soir, il faut choisir, façon de parler, entre deux-trois formules aux choix étroits (55€, 75€, 95€), mais, en forçant la porte, on arrive à obtenir un dîner normal avec entrée, plat, voire dessert et non la pénible procession tant à la mode.
Faut-il y aller? Oui.
Cobéa, 11, rue Raymond-Losserand, XIVe. Tél.: 01 43 20 21 39. Tlj sf dim. et lun. Métro Gaîté ou Montparnasse. Photo FS
Thibaut
8 mars 2012 at 21 h 06 minJ’adore cette adresse, et je compte y retourner très bientôt avec des amis !
Pour le quartier, Cobéa est clairement ce qui se fait de mieux à mon sens.