Buenos Aires (la suite). Il est question de néologismes franco-absurdes…

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Au matin, aller du coté de la Boca, visiter le musée PROA, bien souvent oublié des circuits. C’est dommage, car non seulement le restaurant situé sur la terrasse est plus que valable (calme olympien au déjeuner, vue magnifique sur le pont Avenalleda), mais des installations non sans élégance. Dans une salle, une vidéo nous présente un hédoniste entouré de superbes danseuses hip hop, délivrant son discours du fin fond de sa campagne. Il parlait un français insolent. Façon de réverbérer le truculent métissage linguistique de la ville. L’Argentin, répète-t-on sans fin, est un Italien qui parle espagnol et se croit Français. Le plus truculent, c’est sans doute ici toute la schizophrénie de la ville. On joue avec les argots italiens, espagnols. On glisse même des néologismes franco-absurde du style « pipon » (enrobé), « tientenpied » (snacks), avec ce vérisme cruel et affectueux d’appeler son meilleur ami « boludo » (connard) et si plus si affinités (« hijo de putana ») suggérant une filiation inconfortable. Les femmes héritent d’autant de délicatesse. Lorsqu’elle est est belle, le verdict tombe: barbara!

 Ici, les mots comme les citadins prennent l’air. Ces derniers  sont en dissociations permanentes, impénétrables, adolescents, émotifs. Ce sont des narcissiques qui ne s’aiment pas. Ils font penser à ces vieilles stations d’hiver que la mode et le béton ont épargnées. Elles héritent, par le ressac de l’histoire, d’une estime inattendue. Les portenos sont à contre temps, sans doute la meilleure réponse au siècle précipité.

IMG_5084Il y a presque de cela dans le restaurant de Jean Paul Bondoux situé à l’Alvear Palace. Ce soir, il fait le plein et des tablées se pâment lorsque l’on flambe l’aberdeen angus au cognac. Et au risque de se faire roussir quelques poils de bras, filment ces moments d’une cuisine disparue. L’hôtel a du reste creuser ce respectable sillon avec un five o clock tea, dignes des palaces londoniens.Cette adresse mythique sait soigner son approche avec arrivée en corole, marches et portes à tambour. C’est le vieux palace comme on les aime un peu fou, un peu marteau, avec ses volumes euphoriques, les marbres,les lumières épuisées. Il s’est dédoublé récemment d’une réalisation plus contemporaine, Alvear Arte, qui comme annoncé, cultive l’art, avec volumes élancés, immeubles de verre et clientèle accélérée.