Humeur.Stupeur, la nourriture est sale

Noma et Ikéa sont dans un bateau. Les deux tombent à l'eau. Qui reste-t-il ? Nous, pauvres pécheurs avec nos emballages vides de lasagnes au cheval. L'histoire est tellement féroce qu'en une semaine elle envoie à l'hôpital la reine d'Angleterre pour une gastro-entérite et déniche « un niveau excessif de bactéries coliformes » dans des Chokladkrokant (« croquants au chocolat »), des tartes aux amandes avec du chocolat, de la crème au beurre et du caramel importées par Ikea Shanghaï. Le mois suivant, les autorités sanitaires chinoises détruisent 1 800 gâteaux. En France, 6 000 parts de cette tarte auront été vendues ; depuis lors, dans 23 pays, les lots incriminés ont été rappelés. Cerise moisie sur le gâteau, le meilleur restaurant au monde depuis 2010 (selon le classement pittoresque de San Pellegrino) se prend un pruneau en pleine gloire : 63 personnes ayant dîné au Noma entre le 12 et le 16 février se sont régalées, dans le menu dégustation, d'un norovirus offert gracieusement par le personnel. Déjà, en 2009, un « meilleur restaurant du monde » (décidément, la notoriété est contagieuse), le Fat Duck, à Bray (Angleterre), dirigé par le chef moléculaire Heston Blumenthal, avait dû fermer trois semaines à la suite d'un empoisonnement du même acabit.
Saurait-on être plus clair ? Hélas, oui. Logiquement, on devrait s'arrêter sur le côté de la route, relire la carte, et formuler simplement tout ce que nous voulons : plus de produits sincères, moins d'absurdité (boire de l'eau d'Évian à Tokyo), plus de franchise et de bonté. Moins d'idiotie : la moitié de ce que produit le monde part à la poubelle pendant que d'autres meurent de faim. Cela durerait un petit moment et puis nous repartirions plus légers, en meilleure santé, moins sots, plus proches. Mais l'histoire nous apprend que, depuis peu, nous ne savons plus retenir. Nous passons à autre chose par lassitude : les plats maillots de bain pour l'été, le régime crétois, les nouveaux légumes du printemps. L'amnésie est comme un médicament antidouleur.
Qui se souvient encore du 11 mars 2011 ? Qu'a-t-on retenu de Fukushima ? Quasiment rien. En fait, il n'est peut-être pas nécessaire d'attendre qu'une commission nous aide à penser. Il est clair que nous avons tous les éléments en main. Nous savons exactement comment bien manger, faire la cuisine, boire des fruits pressés, centrifuger des légumes ; ne pas trop consommer de viande ; manger moins, faire de l'exercice, écouter son corps. Ce serait sans doute la bonne nouvelle de ces calamités : nous sommes capables de devenir grands.
  • Anas TAZI
    5 avril 2013 at 12 h 00 min

    Bonjour,
    Dans le cadre d’un reportage pour l’émission 100% Mag sur M6, nous souhaiterions vous avoir en interview.

  • pops
    7 avril 2013 at 5 h 47 min

    Fanfan, dans la restauration…Y a pas de tire au flanc, et les clients partagent en effet les glaviots, crachats des cuistots, serveurs …Ont ils meme le temps de se laver les mains apres s etre torche le cul…?????
    http://www.nypost.com/p/news/local/pass_on_the_pastry_A7jAP60rbsOuILnZBktLuM
    Une des raisons pour laquelle je cuisine: at home
    Allez bon appetit!!!!!