Ce samedi dans le Figaro, j'ai rédigé une petite chronique. Il y avait peu de place, on a du la couper un peu, la voici in extenso..
Le middle East en imprimé zèbre à diamants, des brushings blond "coup de vent", coiffures meringue ou choucroutes, des garçons en cheveux, de magnifiques ennuyés, des dépressions carabinées strassées au glamour Montaigne, des vivas en wachi wacha, le clapotis civilisé des applaudissements…C’est sans doute la plus parisienne des soirées de Paris.
Elle se tient tous les derniers mercredis du mois, et sous la houlette de Werner Küchler, une soirée alternant le chic poussé et le n’importe quoi en pull en V s’ébroue dans les lumières gold du Relais Plaza (25 avenue Montaigne, 75008 Paris ; 01.53.67.66.65). Cela s’appelle soirée jazz. On se bat pour décrocher une table, notamment la 20, celle de Herbert von Karayan. Il y avait ses habitudes. Inutile de vous présenter Werner, cette rubrique vous chante régulièrement les mérites d’un des meilleurs directeurs de salle au monde. Suivez discrètement la chorégraphie de ses allers et venues. C’est un peu un footballeur qui courrait sans ballon. Le ballon, précisément, ce sont ces convives, il sait les accompagner, les mettre en valeur, se décrocher légèrement, marcher en arrière, s’estomper, saluer, disparaître. Buste droit, drible des tables, épaules dégagées, front altier.
Mais il y a autre chose aussi. Werner chante. Jazz, romance… une partie de son public frémit, applaudit comme l’on prie, reprend avec lui des hymnes désuet : 'j’attendrai'. Cette mélancolie tournoyante s’envient chambouler des perclus de la fortune, les poncés du CAC 40. Elle est désarmante de nudité triste et pourtant l’on sourit tendrement de cette personne qui écoute le bruit du vent. Celui ci apporte "des bruits lointains, le jour et la nuit j’attendrai toujours ton retour". Les serveurs rentrent le ventre pour déposer la première des cinq séquences du menu à 75 euros : velouté de cêpes et Bellota bellota, caillettes aveyronnaises-, saint jacques poêlées façon grenobloise, coupe autour du marron et de la poire, ou alors à la carte comme cette sole meunière fort quelconque et banale si ce n’est son prix (70 €, boing !).
Des dames descendent aux toilettes, on s'échange parfois des mots entre les tables ; le sommelier lui aussi retranscrit les coordonnées de son excellent côte rôtie 2005: château de Montlys, de Christophe Semaska à Saint Cyr sur Rhône.
On se pince parfois, on cherche la caméra, ce serait un film de Woody Allen. Un brouhaha mondain rythmé par le bruit des glaçons dans les seaux à glace, le ballet métallétique du batteur sur sa cymbale claire. L’orchetre attaque Sweet Georgia Brown. Ca y es t: un apprenti coiffeur vient de trouver sur son blackberry les coordonnées de la chanson et les transmet à son voisin, un sexagénaire accompagné d’une fille spectaculaire. La chanson a été crée en 1937, c'est quasiment l’année de son anniversaire, il se gardera bien de la rappeler à la jeunesse frémissante qu’il a glissée devant lui. Elle a le regard qui balaie, elle aussi, ne compte pas les années, mais les heures. Bientôt, il sera tard, il faudra repartir, remettre sur ceintre les habits de la soirée. Au petit matin, il y avait encore quelques dièses sur les épaules, le bruit du vent.
(photo F.Simon)
so
28 janvier 2009 at 11 h 34 minMais c’est qui ce « on » dangereux ? Qui m’a un peu gâché le Lapsang, tellement dans ma première rituelle lecture du samedi matin, je me suis dit, ça y est, tu es larguée. Il manquait vaguement qq chose, en fait. Si c’est le SR, il faudrait envisager de changer son coupe coupe pour une lime à ongles. Mais même pas grave, tellement ce qui reste est bon, toujours.