La modernité est une petite bestiole capricieuse. Elle est vive. Elle grignote. Démange, agace. Ça n'a ni queue ni tête. Au moindre mot, on veut tout de suite lui clouer le bec, l'agenouiller, la mettre au pas, d'équerre. Au pied. Imaginez, en matière de gastronomie, cet univers si lent et circonspect. Combien se sont fait tailler un short pour avoir inversé la grammaire, dévissé des phonèmes, tourmenté des sommets, tutoyé une carotte. Aussi, lorsque le designer Ora Ito est venu fourrer son nez dans la sainte chapelle, ça a quelque peu couiné. Qu'il ne s'inquiète pas, c'est le passage obligé pour toute nouvelle création, le bizutage, le rappel à l'ordre. Du reste, la modernité est souvent une réponse du berger à la bergère. On reproche à cette dernière de ne pas être assez réactive, inattendue et paradoxale, alors on crée, on attaque, on cherche le baston. Mais, n'allons pas nous égarer à notre tour… Nous allions oublier l'objet du jour à savoir : qu'est-ce que Nano ?
C'est un restaurant à concept donc. Et le concept se mange, se met au carré, s'allonge, s'oblige. Dans l'entrée, une vaste vitrine réfrigérée propose ses verrines en cubes. Dedans y sont logées des compositions froides et chaudes s'appuyant sur le répertoire actuel plus ou moins déstructuré voire gentiment bousculé en « pixels » de saveurs : club Nano au foie gras, cabillaud en chemise de chorizo, crème de petits pois à la menthe, salade Caesar, oeuf mimosa, tiramisu, cheesecake Tagada… Une formule du jour à 9,50 euros permet d'embarquer cinq verrines sur son plateau.

Sincèrement, il faut être de mauvaise foi pour prétendre que c'est mauvais. Les compositions sont sérieuses, les produits frais et les assemblages fonctionnent honorablement. Certes, il est difficile de mélanger une minisalade dans son cube. Certes, le café du tiramisu est un peu violent, mais il n'y a pas de quoi fouetter une laitue, péter un câble et appeler la gendarmerie. C'est fort plaisant dans le style dînette improvisée. Le cadre est designé à souhait, agréable, pimpant. On rêverait d'être soi-même d'une plastique aussi maîtrisée. Il y a aussi un truc épatant pour ceux qui n'aiment pas manger : les couverts sont de petite dimension. Du coup, on mange par becquetées plutôt que par pelletées. C'est pas plus mal, on mange trop vite, comme des Huns. On mange mal, comme des gorets. Voilà pourquoi ces outils de philatéliste créent un rapport à la nourriture apaisé, mesuré. Les verrines qui s'avéraient un peu riquiquis tiennent la route. Le palais a le temps d'apprécier et de ne pas être en manque comme avec les tapas.
Sincèrement, il faut être de mauvaise foi pour prétendre que c'est mauvais. Les compositions sont sérieuses, les produits frais et les assemblages fonctionnent honorablement. Certes, il est difficile de mélanger une minisalade dans son cube. Certes, le café du tiramisu est un peu violent, mais il n'y a pas de quoi fouetter une laitue, péter un câble et appeler la gendarmerie. C'est fort plaisant dans le style dînette improvisée. Le cadre est designé à souhait, agréable, pimpant. On rêverait d'être soi-même d'une plastique aussi maîtrisée. Il y a aussi un truc épatant pour ceux qui n'aiment pas manger : les couverts sont de petite dimension. Du coup, on mange par becquetées plutôt que par pelletées. C'est pas plus mal, on mange trop vite, comme des Huns. On mange mal, comme des gorets. Voilà pourquoi ces outils de philatéliste créent un rapport à la nourriture apaisé, mesuré. Les verrines qui s'avéraient un peu riquiquis tiennent la route. Le palais a le temps d'apprécier et de ne pas être en manque comme avec les tapas.
Lorsque nous sommes passés, vers midi, histoire d'avoir la paix, il n'y avait personne. Juste le décor. Pour tout dire, un restaurant vide, c'est extra. Mais on imagine une clientèle girly, fashion en diable (Jalouse, L'Officiel, Emmanuel Rubin crèchent à deux pas). Les bûcherons passent leur chemin en rigolant bien fort.
Nano, 14, rue Bachaumont, IIe. Tél. : 01 40 26 35 10. Tlj sf sam. et dim. de 11 h à 20 h. 10-20 euros…