Paris. Le Petit Lutetia, ça c’est Paris !

Admirablement agaçant

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Ce ne doit pas être compliqué pourtant de faire un restaurant à la mode. Il faudrait quoi ? Du cynisme? De la perspicacité ? Les deux se rejoignent. C’est un peu le style Costes, version Thierry et Gilbert ( Georges, Germain, Thoumieux, hôtel Amour, café Français…), ou version Jean Louis (Hotel Costes, Avenue, Société…). C’est ce dernier qui a repris depuis peu le Petit Lutetia, jolie adresse bistrotière, un brin vieillotte dans un quartier un chouia somnolent en retrait du Bon Marché. Qu’y a t il fait? Choisi un animateur vibrionnant (Christophe) qui sait être à la fois archi débordé, bombardé d’appels, de sollicitations, de malaxages de coudes, capable de transporter un guéridon d’une main, une table de l’autre tout en décochant une bise. Ensuite construire une carte vraiment snob avec des intitulés agiles :« un saladier de laitue bien blanche », « une « putain » d’entrecôte »,  « laitue avocat king crabe  28€…avec beaucoup de crabe 38€ ». A la limite, vous (ohé) et moi (passons) pourrions le faire. Sauf que personne n’y arrive. Bravement imité, laborieusement copié, beaucoup s’y sont cassés leurs dents de lait. Car il y a autre chose à tenir parfaitement. La clientèle. Et celle ci est une des plus difficiles au monde. Les Parisiens et les Parisiennes. Faussement détendus, magnifiquement contrariés, en acidité urbaine, en sourires empruntés (à taux zéro), en épidermes parfaits, chevelures nourries. C’est sans doute aussi le succès de ce Petit Lutetia. Cet effet miroir. On vient se jauger dans l’autre: plus vieux, moins moche, plus mince, moins riche, moins con, plus grand. Cela nous donne au final ce cocktail inimitable, et presque irremplaçable. Certes, on peut lire ces lignes avec affliction et détachement, se dire qu’on laisse bien volontiers aux autres misérables cette adresse horriblement chère et désagréablement mondaine. Pourtant, on y passe de délicieux moment, il y a des créatures à vous dessécher de vulgarité, d’augustes fronts, des carnations à sangloter. Et les mots, futiles, jetés, surlignés. Paris, encore. C’est si bon.img_8546

Meilleures tables. Houla, il faut être souple en la matière. Celle qui sera disponible. Par chance (mon oeil) j’ai hérité d’une table face au bar pour deux en côte à côte, mais ce fut un miracle. Sinon terrasse, et recoins.

Dommage. Les soirs de grand rush , la cuisine de niveau plus que correcte et habile, est également dans le rush, salade limite seccos, pavlova manquant de générosité et chantilly exsangue (grosse chaleur) vu son prix (16 euros).

A emporter. La carte et le nom du maitre des lieux (Christophe);

Le Petit Lutetia, 107, rue de Sèvres, 75006 Paris. tel.: 01-45-48-33-53. Tous les jours. Jusqu’à 23h.

Mercure. En cette fin août, 30°c, donc variable en fonction de la saison.

Décibels: 84db le babil  des Parisiens en retour de vacances, quoâ.

L’addition: saignante, on peut se ruiner en un battement de cil: 60 euros.

Minimum syndical: le tartare à brasserie à 24 euros et stop !

Verdict: vaut le spectacle !img_8544