Miss Ko, deuxième couche

Paris, Miss Ko, ext
C’est tout nouveau et franchement, cela vaut le coup d’oeil. Miss Ko, sur l’avenue George-V, à Paris. Le dernier cri poussé du fond d’une machine à laver. Un cri primal lancé par Philippe Starck et quelques habiles tireurs de ficelles. Leur cible : vous ! Avec un but déterminé mais sans franchement de détermination : l’Asie. Un continent pulvérisé, dépenaillé, voire décapité comme l’égérie fantôme des lieux, livrée nue et tatouée en hologramme, Miss Ko. Une sorte de knock-down, une enthousiasmante dénégation cynique d’un monde désenchanté ; un passage sous acide d’un continent compacté et délivré ad nauseam dans le tumulte mou de Parisiens faussement affranchis. C’est bizarre tout de même, cette confrontation toujours compliquée de ces derniers à la modernité. Comme une gêne laborieuse et mollassonne ; un enthousiasme poussif devant une vision qu’on leur restitue : le vrac de l’autre, de l’étranger, l’Asie en l’occurrence. Il y a alors comme une chimie bizarre, un fantastique vide au-dessus de nos propres vertiges.

Paris, Miss Ko, hambugrer
Ce restaurant encore plein fait penser à ce film violemment jouissif dans sa vacuité : Spring Breakers, de Harmony Korine, l’histoire de quatre adolescentes partant arroser l’arrivée du printemps dans une Floride débridée. Une désespérance sexy et encastrée dans le mur, un no comprendo fascinant. Cela dit parfois, quelques secondes durant, on retrouve la scénographie tourbillonnante des bouges de Hongkong, les accélérations embouteillées de lieux de nuits tokyoïtes, la kitcherie sulfureuse du Bund de Shanghaï. Dans ce simili pastiche déjanté, les nourritures sont comme frappées d’aphasie : elles sont estomaquées. Le service fonctionne en brasse coulée avec le sourire des désespérés, le black cod a quelques heures de vol, le hamburger arrive froid, la viande saignante (commandée bien cuite) et le bibimbap sans oeuf sur le plat. On se demande alors ce que l’on fabrique dans cette centrifugeuse saturée d’images et de sons. On demeure sans voix (c’est l’empire des signes). Et pourtant, on reste fasciné comme devant un accident d’auto. C’est notre monde de zombies, dans ses imitations, ses décalques et décalages. On applaudit poliment de peur d’en être exclu. Et ces quelques lignes participent à cette débandade exquise. Vous irez ? Probablement. Mais jetez un oeil, ne l’y laissez pas.Miss Ko, 49-51, avenue George-V, Paris VIIIe. Tél. : 01 53 67 84 60.
 
  • Gould
    22 avril 2013 at 11 h 48 min

    Vous vous êtes fait rappelé à l’ordre par leur attaché de presse pour repasser une couche? 🙂

  • Claire
    22 avril 2013 at 13 h 11 min

    Mais AU SECOURS ce genre d’adresse !

  • Gould
    22 avril 2013 at 15 h 45 min

    ‘Allo? T’es pas retourné chez Miss Ko, non mais allo quoi’

  • Alex Gastronome Parisien
    24 avril 2013 at 19 h 00 min

    Allez dans un resto que l’on sait pertinemment invivable et proposant une cuisine médiocre, il y a plus exaltant comme sortie. A part pour dire j’y suis allé et faire le bobo de service, je ne vois pas trop l’intérêt malheureusement.