Le Bouillon dévore tout sur son passage

DSC01530

Pour M le supplément du Monde, je suis allé il y a peu visiter le restaurant le Bouillon. Voici mon sentiment…

Il serait tentant parfois de capter le style d’un restaurant dans celui de sa clientèle. En faire presque un guide, une typologie. Refaire la carte d’une ville : Marseille, Nantes. Et bien sur Paris. Les quartiers taiseux, ampoulés, neurasthéniques, bavards, indolents… Ca y est, vous voyez plus clair ?! Les m’as-tu vu, entendu, les hauts parleurs. Et puis les suiveurs.

C’est une drôle de meute qui zigzague d’une adresse à l’autre. Un coup de clochette, une sonnette agitée, une alerte informatique et les voilà qui accourent ventre à terre, fument la cibiche sur le trottoir et s’en viennent instagramer la nouveauté. C’est comme un essaim, une nuée. Après, c’est comme un rivage atlantique: on entend le ressac roulant les galets. C’est ce qui va arriver sans doute à cette nouvelle adresse dont tout le monde parle. Le chef est un ancien de chez Jean François Piège et sa compagne Aurélie Alary a monté ce restaurant, dans le 9eme rugissant.

Sa cuisine est bigrement bonne, hautement classique (un superbe bouillon de « vrais »champignons de Paris, foie gras de canard, céléri-coraindre), elle tape avec joliesse et saveurs comme avec ce cabillaud cuit vapeur aux citrons confits et épices. Mais ces dernières font comme la clientèle, comme par syncrétisme. Il faut qu’elles manifestent leur présence, impriment fort (trop), tapent presque du pied d’impatience. Il y a comme une surenchère impérieuse, un désir de transparaitre, exister. « J’existe » semblent-t-elles crier. Certes, certes. La cuisine est ainsi en ces temps. Laisser des traces, ce que nous aimons, mais pas tout de mêmes au point de graver l’écorce de l’arbre.

Les desserts un peu en retrait malgré leur empreinte, assument le decrescendo. Et c’est lorsque le trottoir revient sous nos pieds, que la ville reprend sa dimension. On avait presqu’oublié que la mode, la vogue, lorsqu’elles exercent leur tyrannie, en viennent à gommer la vi(ll)e. Ce qui peut s’avérer blâmable, n’est ce pas ?

DSC01527

Place de choix : Attention de ne pas être trop entassé sur la droite, arrivez un peu plus tôt pour décrocher celles donnant sur la vitrine (et la rue) en léger retrait de l’ensemble.

Dommage : Pour l’instant, cette adresse est des plus courues. Attendez vous à une clientèle bruyante et satisfaite d’elle même. Pas toujours un cadeau , malgré le service adorable.

A emporter : Cette idée des bouillons. Rien de plus apaisant pour le corps. Il y a là tellement de mansuétude et de compréhension !

bouillon champignons

Décibels : 80db avec une clientèle en pleine forme avec un ego parfois légèrement encombrant et le parquet pour amplifier la canonnade.

Mercure : 24°C lorsqu’il y a surchauffe de partout, la pression monte

Addition : Comptez à la carte entre 40 et 50 euros. Carte des vins plaisante avec des prix calmes.

cabillaudMinimum syndical : 14 euros avec le plat du jour (ce jour là : une tête de veau roulée, façon bouillon, pommes vapeur)

Verdict : Attendez un peu et puis venez savourer au calme cette belle et bonne adresse.

Passage à l’acte : Le Bouillon de Marc Favier ; 47, rue de Rochechouart, 75009 Paris. Tel. : 09-51-18-66-59. Fermé dimanche et lundi.

  • soupault
    4 juin 2015 at 15 h 56 min

    Cher Mr Simon
    Un peu pisse-froid votre commentaire. Blasé peut-être? Derrière les éloges, en creux, les critiques. Pas gentil, François Simon. Ou alors suis-je aveuglé par mon inexpérience et mon enthousiasme? En général, je suis d’accord avec vos propos mais là je vous trouve un poil ingrat. Le plat du jour est épatant et c’est la 3 ième fois que je m’y colle. Quant à l’environnement rien à signaler: ni hypsters tatoués, ni 17 ème baulois, Du quartier. Retournez-y à midi.
    Affectueusement. Lydia&Frédéric