Yam Tcha, la gorge d’une cuisine

 

DSC00312

 

Certes, il y a l’assiette. Sa scénographie, les légumes du jardin, la volaille de race, le poivre de sarawak. Certes, il y a la salle, le service. Mais il y a aussi un élément fondamental pour comprendre un restaurant . Et qui sait : l’aimer, y retourner. J’ai toujours pensé que la voix du chef, sa tessiture, ses intonations étaient plus qu’un livre ouvert. Mais sa marque de fabrique, l’épaisseur de son sentiment. De sa bonté. Qu’importe également les mots, tout est dans le ton. DSC00308C’est que je pensais en entendant Adeline Grattard, du restaurant Yam’ Tcha à Paris, lorsqu’elle parlait à ses seconds. Son restaurant situé à l’orée des Halles (bientôt il va déménager, tout à coté)  est modeste dans ses dimensions, au point que la minuscule cuisine donne sur la salle. Entre les deux, le passe-plat (largement ouvert) a été aménagé en table pour deux, un côte à côte privilégié. Vous voici donc presque dans la cuisine, le nez au dessus des plats, le visage dans l’haleine chaude des fourneaux.DSC00305 C’en est troublant, paniquant lorsque l’heure est au coup de feu. On est presque de trop mais qu’importe. Un chef apprécié (une étoile au Michelin) s’active, les traits poncés par le scrupule . Souvent, elle prononce un « oui » appuyé, insistant, presque de sage- femme dont la sonorité vous dit long sur sa cuisine. Il y a là de l’exigence, de la patience (enfin, de l’impatience!). Le « oui> s’étire comme une douce exhortation.DSC00311 A la limite, ce fut le souvenir de cette soirée enveloppé de « petits plats cuits à la vapeur en buvant du thé », le postulat de la maison. Par chance, on y sert aussi du vin : sommellerie avisée et juvénile, sans prise de tête ni de surabondance de « sur » les coteaux, le bois, le fruit, la chaise. Cuisine souple et centrifuge: ventrèche de thon, avec tomates oignons pickles d’oignon ; foie gras de Vendée poêlée avec champignons des rivières asperges et truffe noir d’Australie ; crevettes Curcuma avec un bouillon de volaille et choux pointus ; canard à la séchouanaise. C’est souvent bon, très « senti ». La prochaine fois, laisser trainer votre oreille, non point dans une friture, mais dans le chant des patrons et des cuistots, vous verrez (vous entendrez), ce chant secret, cette peur perdue, cette douleur inquiète . Oui ?DSC00313

 

 

 

Passage à l’acte.

Yam’Tcha, 4, rue Sauval, 75001 Paris. Tel. : 01 40 26 08 07. Fermé dimanche et lundi. www.yamtcha.com

DSC00315

Est ce cher ? Pas donné : 100 euros par personne pour le menu dégustation en sept séquences servi le soir. C’est 60 euros au déjeuner.DSC00314

 

 

  • Lavauzelle
    30 septembre 2014 at 12 h 13 min

    Je garde un merveilleux souvenir de cette table. Adeline Grattard semble, humainement parlant, d’une grande proximité, d’une belle douceur. Et cela se déguste aussi dans sa cuisine.

  • Zeross
    1 octobre 2014 at 12 h 47 min

    J’ai adoré ce restaurant et l’accord mets / thé est une spécificité vraiment intéressante, et permet de prendre un plaisir différent et assez unique.
    La gentillesse de tout le personnel, et plus particulièrement de la chef et de la « maitresse du thé », la salle joliment décorée, et la grande qualité des mets proposés fait de ce restaurant une de mes meilleures tables de 2014 !

  • Gilles Levha
    3 octobre 2014 at 10 h 49 min

    Juste un mot pour dire a tous que Yam Tcha (salade de the en Thai..) c’etait formidable…les gouts sont segmentes, les textures harmonieuses, les ingredients sans compromis… et il ne faut pas oublier de parler d’Adeline, son gout sur, sa bienveillance inquiete et sincere,son regard sur tout, fragile et determine…bref, il faut y aller…et y retourner.