Jeremy à Souspierre, les belles céramiques raku de l’atelier Rouby et Weibel

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Elle ouvre la porte du four enrobé d’aluminium, tire délicatement le vase brûlant, puis le dépose dans le seau métallique posé à côté d’elle. A l’intérieur, des milliers de copeaux de sciure prennent feu une fois qu’elle y introduit l’objet rougeoyant, encore tout chaud des braises qu’il vient de quitter, et qui refroidira rapidement dans cette antre recouverte d’un tissu mouillé.

Des vapeurs de fumée grise s’échappent de cette cheminée lorsqu’elle en soulève le couvercle pour vérifier le résultat. En nage, elle décolle alors ses grosses lunettes rondes de son nez et sourit timidement en voyant la mine étonnée de ceux qui viennent d’assister à ce spectacle. « C’est ça qui donne l’aspect naturel et craquelé à nos céramiques ! Elles prennent la marque des végétaux si l’on peut dire », explique-t-elle, modestement, dans un adorable accent à couper au couteau.

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Barbara Weibel travaille dans son atelier, qui lui sert également de galerie, baigné par le soleil et le vent de la Drôme. Avec son mari Patrice Rouby, ils prenaient autrefois le large neuf mois dans l’année, puis revenaient ici, à Souspierre, près d’une rivière qui s’écoule lentement, comme cette vie d’artiste qui sied à ces deux mystérieux personnages au look de hippies sur le retour. Aujourd’hui ils voyagent moins (un enfant est entré dans l’histoire) mais perpétuent cet esprit d’ouverture qui les a toujours habité. « J’ai vécu quelques années à Paris, quand j’étais jeune, pour faire mon apprentissage, raconte Patrice, mais je préfère de loin cette vie là, au calme, même si on vit chichement c’est vrai ».

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Une technique japonaise qui date du XVIe siècle

Depuis une trentaine d’années, ces deux là utilisent une technique originale de cuisson japonaise appelée « raku », qui consiste à faire subir un choc thermique aux pièces incandescentes qui sortent de leurs fourneaux. Au contact du bois, l’émail en fusion prend des tons métallisés, qui font la beauté de ces vases et de ces assiettes aux couleurs brutes. A voir son visage trituré par le doigté précis que requiert ce procédé, on comprend la rigueur et le stress inhérent à cette méthode de fabrication. Pas une pièce ne ressemble à une autre, tant cette technique, née au XVIe siècle, dépend des saisons, de la pluie, du froid et échappe à la répétition industrielle. C’est un peu la philosophie de la région : ses collines pleines de lavande, olympiennes, qui cachèrent jadis les maquisards, ne rutilent pas. Elles trônent en dehors du temps.

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Au Pays de Dieulefit, vivre de la poterie, même lorsqu’elle est originale et réussie, n’est pas simple. La preuve, la belle maison Mont Rachas, chez qui butinaient les touristes curieux et les amateurs fidèles, a fermé ses portes récemment. Trop de contrefaçons obstruent le marché. Voilà un reproche qu’on ne pourra pas leur adresser : chez eux, l’authenticité est la maîtresse des lieux.

Jérémy Collado

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ATELIER ROUBY ET WEIBEL

http://rouby.poetlaval.eu/

Les Ateliers de Souspierre – Le Bridon – 26160 Souspierre

Patrice Rouby et Barbara Weibel

Tél. 04 75 46 25 72