Ma bonne table de la rentrée: tout simplement, chez Géraud !

Pour le Figaroscope, c’est la rentrée avec des tables dans tous les coins, notamment celle ci !

Paris, Geraud, extér0000288
 

Finalement, on ne devrait aller dans les restaurants que le jour même de l’ouverture. Il y a là une incroyable fraîcheur. Du croquant. Du nerf. Ça sent encore les peintures, les lumières sont trop violentes et le plat du jour est lui aussi épuisé. C’est bon signe. Il y a eu du monde au déjeuner et ce soir, dans ce XVI<SUP>e</SUP> assoupi et déjà au plumard, la salle est pleine. On est presque content pour eux. Qui sont-ils, du reste ? On ne sait pas. Une table voisine questionne. Ah bon, vous avez gardé aussi le chef d’avant ? Non, non, c’est un nouveau. On comprend vaguement en laissant traîner l’oreille que ledit garçon (Gabriel Grapin) a fait un sacré périple. Il y a des cachets partout sur l’enveloppe. Les mots étincellent comme de l’argenterie astiquée : Ducasse pendant dix ans, Londres, Paris, Dorchester, Spoon (époque Moret), Plaza Athénée et enfin Royal Monceau, où il décrocha le pompon (une étoile). L’associé (Arnaud Bachet) préside en salle. Il est drôlement gentil, prévenant. S’excuse de tout, devance les critiques, fera mieux la prochaine fois, améliorera sa carte des vins. Le pain est admirablement bon, on en boulotterait la corbeille s’il n’y avait la promesse des plats claironnés au menu.
Paris, geraud, legumes
La carte est courte mais, bon sang, qu’elle est avenante ! Lieu jaune avec perles de caviar, pousses d’épinard et beurre blanc (28 euros) ; souris d’agneau confite et légumes de pot-au-feu (29 euros) ; ris de veau croustillant sucrines au lard et pommes Maxim’s. On sent ici la touche Ducasse dans ses dentales, ses façons même de biseauter les légumes et les intitulés comme dans son phrasé métallique. Pas gênant au demeurant, lorsque les chefs sortent d’un enfermement aussi intrusif, ils découvrent alors une voix nouvelle, un chant soudainement libéré. C’est souvent instructif. On écarte les branchages et boum, voici une clairière, un nouveau chef affranchi : Gabriel Grapin, donc. L’assiette est percutante en diable, prononce bien les propositions, touche à fond. Les desserts sont aussi de facture conventionnelle, ce qui ne déplaira pas à l’arrondissement : Paris-Brest, riz au lait et sa confiture, baba au rhum et sa chantilly vanillée…

Paris, geraud, poissons
 

 ici, le XVIe en pleine forme et livré tel quel. Beaucoup de voisins, donc, il ne semble pas que l’on soit venu déjà de l’Est parisien en métro (station : La Muette, la bien nommée). On risque de le faire. À la table d’à côté, sous la fresque de Sarreguemines, une dame tout en cheveux brushés lit la presse économique avec fermeté et concentration. Son mari ne moufte pas. Il dort à moitié. Tente de relancer la conversation. Elle ne répond pas. Tout à coup, elle s’adresse à lui :
– Tu as eu ton horoscope ?
– Non

– « Préservez-vous ! », dit-elle sans ironie.

À la table d’à côté, une famille cause money.

– Que veux-tu, aujourd’hui, 200 000 euros, cela ne veut plus rien dire. Autant laisser les murs s’effondrer, on ne va pas s’embarquer dans des travaux !

Autre table encore, où trois Allemandes spectaculairement laides apportent une touche plus humaine au tableau. Elles becquettent avec soin et se noircissent le museau avec un plaisir communicatif.
Sachez enfin, qu’il y a ici des plats du jour à 14 euros et qu’à la carte, il faut compter 40-50 euros…

Chez Géraud, 31, rue Vital, XVI
e. Tél. : 01 45 20 33 00. Fermé samedi et dimanche.
 
  • Domino
    24 septembre 2013 at 9 h 18 min

    à découvrir, toujours dans le 16ème, le petit Géricault qui vient d’ouvrir.