Sicile, l’étrange rendez vous avec Baby Luna

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 En arrivant à Palerme, avec Fulvio, nous sommes donc allés manger quelques poissons au restaurant. j'étais tellement content!….

 Tout était bon à prendre même ce maudit rouget qui  planta une arête féroce au fond de ma gorge. J'ai tout essayé, le pain, l'eau, la tête à l'envers, les yeux fermés, ouverts. j'ai fait pleurer mes yeux pensant que l'on pouvait distraire l'attention de l'arrête. Rien. Les doigts, un stylo, un crayon. Toujours cette flèche ironique.

 Nous sommes allés dans un hôpital au service des urgences. Combien étions nous? La terre entière avec cette épaisseur nouvelle, celle des impérieux que le mal devrait placer sur le devant de la scène. l'interne lui même aurait pu se mettre dans cette chenille de malheurs domestiques. Blondi par le soleil de la mer, caramélisé de près, il arborait une main qui avait doublé. Un poisson, lui aussi, avait devancé son sort et lui avait injecté son venin.
Parfois, un vieux monsieur passait précédé du cortège de la famille. Sur sa peau parcheminé, on aurait pu écrire un testament, des dernières volontés. Il y avait juste un souffle poussé sur un fauteuil roulant. Un éternuement l'aurait été enseveli dans l'instant.

 L'interne devait avoir l'habitude de ce genre de bouchons pathétiques. Il nous griffonna le numéro d'un médecin. 

– Appelez- le de ma part!.

Antonio Turturici n'était pas à son cabinet. 

Il était en train d'acheter un lave vaisselle à sa maman. 

Qu'à cela ne tienne, il pouvait se libérer quelques instants. Il nous donna rendez vous au Baby Luna bar, à Sciacca. Rien de plus rassurant que le nom d'une actrice porno italienne bien connue. Notre homme était là. Avec des airs entendus, il nous conduisit à son cabinet, alluma un ou deux néons, planta une lampe de mineur sur son front.

 - Faites ah.

 Je le fis.

 - Ce sera soixante euros, marmonna t il en me prescrivant trois gargarismes par jour de Oky sol, une substance verdâtre.

 - L'arrête est partie mais l'irritation vous donne l'illusion de sa présence.

 Ce pourrait être une philosophie de l'absence.

(photo F.Simon). 

  • titi
    15 mai 2010 at 11 h 21 min

    les risques du metier ,vous aurriez pu demande un arret de travail ;

  • Gould
    15 mai 2010 at 14 h 22 min

    Anthony Bourdain!

  • emmanuelle
    18 mai 2010 at 20 h 17 min

    c’est très littéraire ça. vous devriez écrire des romans dans lesquels vous parleriez de la vie comme vous parlez de la cuisine ailleurs puisque vous avez un tel talent pour décrire la vie, les situations, les urgences de Palerme.