Il n’y a pas à tortiller: la Tour d’Argent est de retour !

La tour d'argent françois simon
 J'avoue que j'ai un faible pour cette adresse. J'avoue aussi lui avoir régulièrement tapé sur la tête sans doute parce ce qu'il s'agit là d'un lieu exaltant. Ca vous prend comme ça. Mais bon, là, ça bouge dans le bon sens. Voici un petit texte pondu pour le Figaro Quotidien

Elle languissait dans la disgrâce, cahotait à droite et à
gauche, ramait à contre courant, transpirait dans les sens interdits. En fait,
notre bonne vieille Tour d’Argent était en veuvage, depuis la disparition de
Claude Terrail (1er Juin 2006). Son fils André a pris la suite avec
cette superbe contrariété qui faisait le charme de son père : <Je suis
le prisonnier de la tour> aimait-, – il répéter de sa voix admirable (façon
Fantomas) . Il aurait adoré devenir acteur de cinéma ; il en avait le
physique et le phrasé à là Louis Jouvet. Du reste, cette contrariété appartient
également à la clientèle de cette adresse mondialement réputé. On sent le
stress de la grande table, le knout de la solennité, la dimension anxiogène du
privilège.

Il faut attendre 22 heures pour que  l’atmosphère se déride quelque peu. Le
soleil vient de se coucher majestueusement  derrière Notre Dame, le vent semble gonfler les voiles de
cette goélette posée sur cet immeuble du quai de la Tournelle. C’est toute la
magie de la Tour d’Argent de constituer une atmosphère, fut elle guindée,
empruntée, avec Paris irrésistible à ses pieds, les murmures, les conversations
de la terre entière. André Terrail a placé depuis peu, un nouveau chef, Laurent
Delarbre, 39 ans, formé par Michel Roth et Manuel Martinez, deux pointures de
la gastronomie de palace.

Et l’assiette dans tout cela ? Elle est vaillante, bien
entendu, cravachée à entendre les coups de gueule en cuisine (toujours bon
signe). Elle délivre à la fois le répertoire daté de la Tour, une gastronomie
muséifiée mais désarmante comme ces superbes  quenelles dans leur abstraction poudrée et soyeuse (toute
une époque transformant à tour de bras). Le siècle est également présent avec
ces plats tranchés, déstructurés, articulant ses diphtongues, procédant par
phonèmes, onomatopées. C’est bon en tout cas avec sans cesse des moments :
le caneton qui s’en va se faire découper au <théâtre>   (le kiosque de découpe) ou encore la sommelière qui remporte la
bouteille vide. <Je vous remercie> dit elle. <Ah bon, vous
partez ?!>.

             
Non mais la bouteille, oui.

             
 C’est tout
cela, la Tour d’Argent, irrésistible, cocasse, désarmante. On y retourne quand
vous voulez !

 

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Pourquoi vous irez ?

             
l’arrivée dans la salle du restaurant. Un ascenseur
vous hisse au sixième étage, surtout (surtout !), ne loupez pas cet
instant, c’est sans doute le plus beau travelling de la gastronomie française.
Le personnel se retourne sur vous, Paris se déploie.

             
-La vue est idéale. L’angle avec le couchant (bien
vérifier les horaires du coucher du soleil) avec Paris dans ses méandres, sa
classe. Il y a même des perspectives insoupçonnées style Central Park (la cime
des arbres du quai avec les immeubles de la Défense.

             
Le caneton « Tour d’Argent », pommes de terre soufflées
(deux personnes)130 €

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Ce qui cloche…

La carte des vins. Impressionnante, mais toujours chère
sauf si l’on précise bien ce que l’on veut. N’hésitez pas alors à prendre les
choses en mains  et, sans complexe, dire votre budget. C’est comme cela
que j’ai hérité d’un Saint-Chinian « Schistes » 2001 Borie la Vitarèle 80€ lors
de votre dîner à 80 euros (pour mémoire, il est proposé à 12 euros dans le
commerce, dans son dernier millésime).

 
Les desserts. Certes avant, la poire parisienne avait
son charme lorsque l’on devait casser sa carapace sucrée avec sa cuiller mais
aujourd’hui, ce n’est pas bien dans un elliptisme passe partout. Où sont donc
passés les vrais desserts  de jadis? Dodus et paisibles, scélérats et
comestibles…

 

Morale de l’histoire

Faut-il aller à la Tour d’Argent ? Bien sûr, au moins
une fois dans sa vie comme Paul Bocuse. Cela fait partie des panthéons de la
gastronomie française, 
 sacrément daté, mais enthousiasmant aux âmes simples et
bienveillantes.

 

Revue de détails

Homme clé : André Terrail

Portables : fortement déconseillé

Cigares : descendre par l’ascenseur, 20 minutes

Prix du café : 12 €.

Voiturier : oui gratuit sinon pont marie

Salons, au cinquième étage, à partir de 12 personnes
prix ?

Plan flambeur. Certes, il y a les menus dégustations à 160 €
mais rien ne vaut le confort dispendieux de la carte. Pour deux
personnes : foie gras d’oie des Trois Empereurs brioche au beurre salé 80
euros + le caviar osciètre blinis et condiments 250 € suivis du Caneton Tour
d’Argent, pommes de terre soufflées 130 €, et en dessert, les crêpes Belle
Epoque pour deux 48 € avec en suggestion, un Charmes Chambertin Grand Cru 1993
Domaine Rousseau 185€. Deux cafés, 24 €.

Total : 717 €

 Plan malin :  Bien entendu, cela se joue au déjeuner avec un menu facturé 65
€ : quenelles de brochet «André Terrail», Canette de Vendée, confit de cuisse aux abricots, fraisier
au parfum de rhubarbe. On choisira pour le vin un côtes du Roussillon « Sumeria
» 2003 Domaine Laporte 62€.

 Total :
192 €.

People. Les derniers visiteurs de la Tour :  Vincent
Bolloré, Woody Allen, Paulo Coelho, Olivier Dassault, Jean Reno, Edouard Balladur,
Jean-Marie Bockel , François Bayrou, Patrick Timsit,  Bill Gates, Jamel Debbouze, Jean-Michel Aulas, Muriel Robin,
Le chanteur Corneille, Jean-Pierre Marielle, Xavier Darcos.

 
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Tables en vue : 
Parmi les 25 tables du restaurant, celle de la rotonde est la plus
recherchée.

A éviter : entre le théâtre et la rotonde, dans le
passage.

Les plus discrètes : première salle, ou alors les 10 et
14, près de la découpe et 59 salle du haut.

Le meilleur moment : coucher du soleil, votre arrivée.

Temps de réservation : une table pour deux un vendredi
soir, un bon mois.

Jour de fermeture : dimanche et  lundi .

Metro pont marie

Site : www.latourdargent.com. 15 quai de la Tournelle (01.43.54.23.31). MAP

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  • Djinnz
    6 septembre 2010 at 10 h 12 min

    « Prix du café : 12 €. »
    Qu’est-ce qui peut bien justifier un café à douze euros, et des coefficients multiplicateurs aussi ahurissants pour les vins? Apparemment, le menu n’est pas bradé pour autant…
    Payer un tel prix pour aller dans un musée, moi non, merci! Je préfère la cuisine de 2010, qui en plus est (comparativement!) bien moins chère.

  • Chrisos
    6 septembre 2010 at 11 h 09 min

    Pour le vin, c’est méchant de comparer le prix d’une bouteille 2008 ou 2009 avec une de 2001!
    j’ai cru comprendre, au contraire, que niveau vins, il pouvait y avoir de bonnes affaires

  • Pascal Henry
    6 septembre 2010 at 11 h 34 min

    Y a pas à tortiller,coefficient 6 pour un Saint Chinian on est en plein royaume de la voyoutocratie,pas plus,pas moins.

  • emmanuelle
    6 septembre 2010 at 13 h 31 min

    c’est exactement ca : les trois raisons avancées dans « pourquoi vous irez ». Le plus beau travelling de la gastronomie française, cette vue waouh, et le cérémonial de la découpe du canard.
    Djinnz, question : c’est quoi la cuisine 2010?

  • Chrisos
    6 septembre 2010 at 14 h 29 min

    >Pascal Henry : la vraie question est surtout : combien couterait cette bouteille 2001 dans le commerce aujourd’hui?

  • Franck
    6 septembre 2010 at 15 h 07 min

    Malgre des commentaires du style 2010, j’iaris une fois dans ma vie meme en y depensant 1000euros.

  • thomas
    6 septembre 2010 at 15 h 38 min

    bonjour,
    Pour y avoir été mangé c’est vrai que les desserts manque cruellement de style , d’osmose il n’y a aucune cohésion quand on voit que les desserts frisent les 30 euros on s’attend à avoir du niveau dans ces derniers …… et bah NON !!! pour 30 euros vous avez une coupe abricot et clafoutis amandes ou encore un duo de chocolat, sorbet à la menthe fraîche ….. non mais on se moque de qui ? quand on vous amene le dessert ont se croiraient au bar du coin ! cela representent t’il ces étoiles au michelin ?????????? JUSTE ABSURDE !
    En revanche cotés cuisine rien à redire !

  • Pascal Henry
    6 septembre 2010 at 15 h 46 min

    Ce qu’il y a de pénible dans la gastronomie,c’est que le restaurateur rentabilise son établissement avec des corps de métier qui ne sont pas les siens.Je préfèrerais payer plus pour sa prestation culinaire et qu’il se montre plus sage avec les coefficients sur les vins et autres eaux minérales,cafés,tisanes.
    Parce que la démarche des clients quand ils vont au restaurant est d’abord pour le talent du cuisinier(e)!

  • Claire
    7 septembre 2010 at 15 h 29 min

    Malgré ce compte rendu tout à fait positif, rien n’y fait, franchement ça ne me fait pas envie. Et pourtant le sourire de la jeune femme fait plaisir à voir …

  • moi mm
    9 septembre 2010 at 8 h 54 min

    la nape!!!! mm pas repassée!!!! grrrrrrr grosse grosse grosse négligence

  • marie
    14 septembre 2010 at 16 h 11 min

    j’ai eu la chance d’y aller grace au jeu des gourmets et pour fréquenter de nombreux restaurants étoilés j’avoue que j’y allais un peu à reculons. Cela a été une bonne surprise car tout ce que nous avons mangé était excellent, plus moderne qu’espéré. les desserts étaient très bons (bien meilleurs qu’au grand vefour ou que chez jean Sulpice qui ont tous deux 2 étoiles°. a suivre car la renaissance est en marche

  • Se Faire de l'Argent
    10 février 2014 at 5 h 59 min

    J avoue qu il y a un bon moment que je n avais pas eu autant de plaisir avec un article de cette trempe !!!

  • Délices à Paris
    24 décembre 2014 at 1 h 53 min

    Je confirme j’ai trouvé les desserts de haut vol, je le pense qu’ils ont le niveau pour atteindre la deuxième étoile.